Afrique du Sud, France, Turquie ou comment se banalise la militarisation de la société

En dehors des stricts constats de situation de guerre ouverte ou de mouvement de troupes, la militarisation peut être étudiée sous l’angle de ses impacts quotidiens sur les relations sociales en tant que processus construit. Ce texte propose d’analyser cette construction. Dans un premier temps, nous isolerons les définitions : militarisation, militaire, militarisme, militarité. Dans un deuxième temps, nous établirons que la militarisation se base sur la subordination/attachement des États et populations aux forces armées, sur leur fonctionnement militaire et les valeurs qui l’accompagnent – ordre, obéissance, hiérarchie, sublimation de la virilité[1], etc. Nous verrons qu’en tant que telle, la militarisation n’est pas figée dans le temps. Elle est le produit d’une histoire coloniale autant qu’elle produit de nouveaux effets économiques, politiques et sociaux, de nouveaux comportements, rapports sociaux et épistèmês et renforce les rapports de domination (race, classe, genre) existants.

À l’appui de cette analyse, nous mobiliserons des observations en France, en Turquie et en Afrique du Sud. Ces trois pays ont été choisis tant pour leur situation géographique – Europe, portes de l’Asie, Afrique – que pour leur héritage colonial ou impérialiste. Chacun d’entre eux connaît une histoire coloniale spécifique soit en tant qu’ancien pays colonisé (Afrique du Sud) soit en tant qu’ancien État colonisateur (France) ou encore en tant qu’ancien empire (Turquie). En outre, la France a contribué ou continue à contribuer aux rapports de domination qui caractérisent les situations coloniales : aliénation et oppression par les élites des subalternes[2]. L’État français a entre autres bravé l’embargo sur les armes à destination de l’Afrique du Sud, voté par les Nations unies en 1977 contre le régime d’apartheid, en vendant des armes au régime ségrégationniste[3], qui avait alors fixé son budget de défense à 30% du budget national (contre 3% aujourd’hui, voir infra). Plus récemment, en juillet 2017, au moment où l’État turc a décidé d’augmenter drastiquement son budget sécuritaire (défense et police, voir infra), un accord préliminaire a été signé entre le consortium européen Eurosam (MBDA et Thales) et les industriels turcs Aselsan et Roketsan, dans le but de développer un nouveau système de défense aérienne à long terme[4].

Ces trois pays s’illustrent également par le paradoxe permanent entre démocratie et violence d’État qui les structure (manifestations xénophobes, hauts taux de féminicides en Turquie et Afrique du Sud, lois renforçant les mécanismes sécuritaires ou engagements dans des conflits militaires en Turquie et en France). Par ailleurs, l’actualité de ces trois pays (élections, attentats terroristes, répression policière ou militaire, violences sexuelles, attaques racistes, situation de guerre ouverte) rend compte de l’option militarisée des réponses apportées par certaines de leurs populations ou par leurs dirigeants. Les chômage, pauvreté, écart de richesse, antiféminisme, course au profit rapide des hommes au pouvoir, rhétoriques démagogiques ou populistes, représentent autant d’indicateurs pertinents pour la comparaison.

Grâce à la grille de lecture que nous a léguée Andrée Michel sur les « fonctions latentes de la militarisation par les systèmes militaro-industriels (SMI) »[5] et aux travaux de Jules Falquet sur la « guerre de basse intensité contre les femmes »[6], nous pourrons constater dans ces trois pays le renforcement de la production de rapports sociaux inégalitaires, l’augmentation de la division sexuelle du travail, de la restructuration du travail, du développement de la culture de guerre et leurs conséquences directes : viols, conception du territoire en tant qu’espace de conquête, généralisation de la violence, exportation des systèmes répressifs et de torture, contrôle social brutal et guerre contre la population civile. Ces renforcement et augmentation, voire surenchère, vont démontrer le lien structurel entre militarisation et colonialité.

Militaire, militarisme, militarité, militarisation…

Afin de mieux appréhender le processus de militarisation, nous allons nous attarder sur quelques définitions. Qu’est-ce que la militarisation ? Quelle est la différence avec le militaire, le militarisme, la militarité ?

Le militaire est un membre des forces armées, institution de défense d’un État. C’est un individu dont le métier est de respecter l’ordre, en acceptant obéissance et discipline. Un « homme en armes », dirait Jules Falquet[7]. En temps de guerre, ses droits personnels sont limités. Il peut occuper des fonctions de commandement ou de logistique, le tout au service de la défense du territoire, de la participation aux systèmes d’alerte de sécurité et d’information et du maintien de la paix à l’étranger et sous mandat international. Dans la plupart des pays, les hommes sont majoritaires dans les corps d’armée : en France, les femmes représentent en 2015 environ 15,5% des effectifs[8] ; en Turquie, les femmes peuvent servir dans l’armée uniquement en tant qu’officiers – en 2013, elles étaient 1 345 sur un total de 723 741 militaires[9] ; en Afrique du Sud, les femmes représentent 32,7% des effectifs[10].

La militarité recouvre tout ce qui se rapporte au « corps militaire » et à ses « vertus ». On peut ainsi lire dans les carnets d’un général de gendarmerie à la retraite[11] la liste de ces vertus : « dévouement », « disponibilité », « discipline », « robustesse », « posture morale », le tout au service de la « démocratie ». Elle est rigoureusement associée à la hiérarchie. Elle concerne uniquement ceux qui constituent les corps de métier assurant la sécurité du territoire : les militaires, les gendarmes, les policiers. Cette définition est confirmée par Marie-Anne Paveau : « Nous appelons militarité l’ensemble des marqueurs (professionnels, juridiques, sociaux, idéologiques, culturels, corporels) attachés à la fonction militaire qui est autant une profession qu’un mode d’être »[12]. Emilie Beauchesne parle de « masculinité militaire » afin de qualifier l’importance de la « possession des femmes » et la « dépolitisation construite des violences contre les femmes » en tant que structure de la militarité[13].

Le militarisme rend compte de l’idéologie politique, ou d’un courant de pensée, qui prône la primauté de la force militaire dans les relations interétatiques et dans l’organisation intraétatique. Par exemple, à l’issue de la IIe Guerre mondiale, et selon Andrew Bacevich, le militarisme américain a eu pour vocation de faire la promotion des « normalisation de la guerre, glorification des chefs militaires, recherche élitaire de la supériorité stratégique perpétuelle, accoutumance de la population à la guerre, “esthétique de la guerre” technologique à distance, et enfin transfiguration des présidents en seigneurs de guerre »[14]. Le militarisme garantirait la stabilité des économies, y compris en temps de paix – par la production d’armement –, et favoriserait les prospérités nationales[15]. Cette définition concerne alors les relations entre États et les populations qui s’y rapportent. Andrée Michel évoque les responsabilités respectives des systèmes médiatiques et éducatifs qui, comme le rappelle Jules Falquet, « légitiment le militarisme sur le plan idéologique »[16]. Elle ajoute en citant la chercheuse-militante antimilitariste : « Érotiser la guerre avec des images de pinups et de soldats musclés, la dé-réaliser et la transformer en “jeu” vidéo, présenter aux enfants et aux jeunes la vie militaire comme un idéal viril ou un modèle de discipline, de moralité et d’amitié, minimiser l’impact du nucléaire sans crainte du ridicule en décrivant le mouvements de nuages respectueux des frontières de l’Hexagone : c’est cela, aussi, le quotidien du [Complexe militaro-industriel] CMI, son danger et sa redoutable force »[17].

Au sein de ce militarisme, Jules Falquet discute la notion de guerre et l’importance de la réorganisation de la violence dans le monde[18]. Selon l’auteure, au-delà du consensus sur le néolibéralisme, on assiste à une guerre de « basse intensité », d’une gravité comparable aux guerres ouvertes ou officielles, et qui les précède. Cette guerre de basse intensité est née pendant la guerre d’Algérie lors de laquelle l’OAS a développé une doctrine et des pratiques que certains de ses membres ont exportées d’abord au Brésil, en Argentine et au Chili. Parmi elles, la pratique et la théorisation de la torture sur la population civile, désarmée, destinée principalement, voire uniquement, à la terroriser. La sociologue démontre l’existence d’une guerre de basse intensité des hommes contre les femmes, moins symbolique que brutale, réelle.

Elsa Dorlin, de son côté, évoque les étapes historiques au cours desquelles les pays colonisateurs interdisaient aux colonisés de s’armer alors qu’ils l’encourageaient pour les colons[19]. Par exemple, en 1685, le Code noir défendait « aux esclaves de porter aucunes armes offensives ni de gros bâtons » sous peine de fouet. Au XIXe siècle, en Algérie, l’État colonial français interdisait les armes aux indigènes, tout en accordant aux colons le droit de s’armer. Selon la philosophe, une ligne de partage oppose historiquement les corps « dignes d’être défendus » de ceux qui, désarmés ou rendus indéfendables, sont laissés sans défense.

Il y a plus de trente ans, Andrée Michel a démontré que les processus de désarmement avait bien eu lieu à la fin de la IIe Guerre mondiale, mais que les courses aux technologies militaires et spatiales continuaient, que les dépenses militaires dans les pays « en voie de développement » augmentaient par effet de vase communicant avec les pays dits « développés », que le marché au noir des armes florissait, que la surenchère de la production nucléaire accroissait les risques de piratage du matériel militaire, que les conflits internes à l’échelle planétaire était en pleine expansion[20]. Pour preuve, elle citait les guerres de Yougoslavie, du Rwanda, d’Afghanistan et de Tchétchénie.

Alors que la sécurité des États, si toutefois elle était réellement menacée, pourrait être basée sur la prévention, la négociation et le dialogue, les « grandes sociétés industrielles contemporaines » ont décidé une militarisation à outrance. Ce choix a pour conséquence directe les « reproduction et élargissement de la domination des pays du Nord sur les pays du Sud, des inégalités sociales et économiques internes à chaque État-nation et des inégalités basées sur le genre »[21]. Andrée Michel évoque ainsi le rôle de ce qu’elle nomme les « fonctions latentes de la militarisation par les systèmes militaro-industriels (SMI) »[22] qui recouvrent la reproduction et l’élargissement de la domination des pays du centre sur ceux de la périphérie[23], l’ensemble des inégalités sociales et économiques internes à chaque État et les inégalités de genre[24]. Selon la sociologue, les SMI ont pour objet de « préserver le statu quo dans la domination » de classe, race, genre[25]. De fait, ces systèmes érigés par le CMI[26], produisent des politiques internationales, différenciées selon les classes et le genre, jamais énoncées en tant que telles par ses promoteurs, ni perçues comme telles par ceux et celles qui les subissent. Pour se maintenir, les SMI incluent la militarisation de l’économie, qui s’accompagne du taylorisme et « repose sur la division sexuelle du travail »[27]. La sociologue ne parle pas tant du sexisme dans l’armée, qu’elle ne nie pas, mais bien de la production de rapports sociaux inégalitaires, de la restructuration du travail, du développement de la culture de guerre et de leurs conséquences directes : prostitution, viols, trafic, pillage des ressources, conception du territoire en tant qu’espace de conquête, généralisation de la violence, exportation des systèmes répressifs et de torture, contrôle social brutal et « guerre contre la population civile ».

L’organisation du travail est transformée, « militarisée »[28], afin de satisfaire aux besoins de l’industrie militaire, et ce dans de multiples secteurs, dont ceux des télécommunications. Cette militarisation économique s’enchâsse dans un système plus général de contrôle des décisions politiques, le pouvoir exécutif disposant « d’attributions excessives »[29] et étant composé d’élites cooptées[30]. Comme elle l’avait très tôt indiqué en citant Kemp, « la militarisation se définit par trois critères : les dépenses militaires, le commerce des armes et les interventions armées, menées soit au cours de guerres civiles, soit au cours de guerres opposant des nations ennemies »[31]. À propos de la France, Michel cite à l’appui de ce constat les travaux de Scilla McLean : « C’est le gouvernement français qui décide de ce que le Parlement débattra et à quelle date. […] Le Parlement français n’a ni le pouvoir ni la volonté réelle d’être un véritable décideur »[32]. Enfin, Andrée Michel insiste sur la pénétration du CMI dans la société des loisirs, la recherche et les médias dans le but d’« imposer un discours monolithique, unidimensionnel, susceptible d’établir le consensus dans l’opinion publique »[33]. Elle décrit cette imposition comme une véritable opération de séduction[34].

La militarisation rend compte d’un processus contextualisé et historicisé dont le résultat peut se résumer à la banalisation de l’autorité, à des rapports hiérarchisés, à l’utilisation des armes, à l’imposition du sentiment de menace et du besoin de sécurité, à la violence, à la domination des hommes sur les femmes, etc. Elle incarne l’histoire coloniale des États, colonialistes ou colonisés, pour laquelle la violence est centrale afin de légitimer un pouvoir politique par la force et d’asservir des populations. Cette violence constitue un héritage, une forme de socialisation des individus, qui perdure après les périodes d’invasion, de guerre, de conflit.

Une militarisation inscrite dans l’histoire

Dans les trois pays de notre étude, nous nous intéressons aux manifestations de la militarisation dans la société au prisme de leur histoire, et en particulier de leur histoire coloniale. Partant d’exemples de faits récents, nous allons examiner en quoi ils s’inscrivent dans un héritage colonial ou impérialiste et plus globalement dans une colonialité[35] renforcée. En France, nous observerons la dépolitisation de la contestation en Guyane par milices armées interposées. En Afrique du Sud, nous constaterons la recrudescence des actions de groupes fascistes et de commandos militaires ou policiers, des manifestations xénophobes et de la violence, déjà très élevée à l’égard des femmes. On retrouvera des formes opératoires militarisées comme le port de cagoules. En Turquie, nous vérifierons que, entre la police et l’armée, les organes de répression ne se sont jamais éloignés du pouvoir politique. Première force politique du pays depuis sa fondation en 1923, l’armée est intervenue régulièrement, au point de structurer l’État. L’héritage de ce militarisme questionnera celui des deux autres pays.

En Guyane, une contestation militarisée

La Guyane, département d’outremer français, peut se caractériser par sa grande misère. Selon l’Office de l’eau en Guyane[36], 46 000 personnes n’ont pas accès à l’eau potable. Le taux de chômage en 2016 est de 22,3% (25% pour les femmes et 21% pour les hommes, deux fois plus élevé que celui de la métropole), et de 44% pour les 15-24 ans[37]. Seuls 50% de ces jeunes sont scolarisés (60% en métropole)[38]. Le revenu annuel moyen est inférieur de plus de 44% à celui de l’hexagone et les bénéficiaires des minima sociaux sont trois fois plus importants[39]. Les prix à la consommation y sont supérieurs de près de 12%[40], et cet écart augmente pour les produits alimentaires (45%) et pour les logements (20%). Le taux de criminalité[41] est deux fois supérieur (109,33%)[42]. En 2008, le nombre d’homicides a atteint le chiffre de 31,1 pour 100 000 habitants (12 fois celui de la métropole), les coups et blessures volontaires 380 pour 100 000 habitants (2 fois celui de la métropole) et les vols à main armée 96,7 pour 100 000 (plus de 20 fois celui de la métropole). Ces niveaux de violence sont notamment les conséquences d’une délinquance particulière liée à la richesse du sous-sol guyanais : l’orpaillage. En 2017, la Guyane abrite en effet près de 610 sites d’orpaillage illégal[43], employant entre 5 000 et 10 000 personnes, alors que seules 900 personnes travaillent sur des sites d’orpaillage légaux. L’orpaillage clandestin conduit, selon les estimations de la gendarmerie nationale, à l’extraction et l’exportation illégales de 10 tonnes d’or par an[44].

Moins connu, la Guyane détient le record national du taux de viol sur mineures (autres départements d’outre-mer compris)[45] : 37 cas pour 100 000 habitants, contre un cas dans l’hexagone. Ce phénomène se double d’un nombre très élevé de grossesses précoces : 80 fois supérieur à la moyenne européenne, soixante fois le taux de la métropole. En 2014, 34 jeunes filles de moins de 15 ans et 376 âgées de 15 à 18 ans ont accouché en maternité[46]. Une des raisons de ce phénomène est la prostitution occasionnelle. De très nombreuses jeunes filles en échec scolaire ou ayant des problèmes économiques y ont recours[47]. Par ailleurs, ces chiffres sont le résultat des agressions sexuelles, de la quasi-inexistence des informations concernant le planning familial et du faible nombre de personnel judiciaire et médical sur le territoire.

Afin de dénoncer et combattre cette situation désastreuse – tout du moins la partie générique, hors violences sexuelles –, plusieurs mouvements sociaux ont, en mars 2017, battu le pavé, ont érigé des barrages dans les villes, ont perturbé des liaisons aériennes, ont fermé des écoles. Ils entendaient fustiger l’impérialisme spatial français, le pillage du sol, revendiquaient des emplois, de meilleures conditions de travail, des formations, des garanties pour la santé et l’avenir énergétique du pays.

Ces mouvements ont vu émerger les « 500 frères », un groupe né après le meurtre d’un habitant d’un quartier populaire de Cayenne en février 2017. Ce « collectif contre l’insécurité » a dit s’emparer des questions économiques et sociales, du chômage, de la déscolarisation, etc., tout en tenant ses distances avec les 37 syndicats composant l’Union des travailleurs guyanais (UTG), jugée pas assez dure. Les actions du collectif se sont voulues musclées et ses revendications visaient à renforcer les moyens policiers et judiciaires : éradication des squats, construction d’une deuxième prison, maintien d’un escadron de gendarmes mobiles affecté en renfort, renvoi dans leur pays d’origine des détenus étrangers pour y purger leur peine, soit plus de 50% des détenus. Les 500 frères dénonçaient une immigration non contrôlée[48]. Mickaël Mancée, un des porte-parole, a alors assumé la radicalité du collectif en la matière : « Un voleur mort, c’est un voleur qui ne vole plus »[49], en sous-entendant que la majorité des voleurs sont des étrangers. Il s’est dit prêt à mobiliser ses « frères » s’il n’aboutit pas : « Aujourd’hui, on dialogue. On fait tout pour empêcher une guerre civile. On est tous pères de famille, on n’en a pas envie… Mais si les voyous veulent la guerre, on la fera »[50].

Cagoulés et vêtus de noir des pieds à la tête, ces hommes – il n’y avait pas de femmes –soutenus par la population, disaient remettre en cause l’abandon des pouvoirs publics. Parmi eux, on comptait des artisans, pêcheurs, ouvriers, chefs d’entreprise, d’anciens militaires… âgés de 25 à 55 ans[51]. Le nom du groupe viendrait du film « 300 »[52], un péplum américain sorti en 2007 qui sublime la vaillance et la beauté de 300 soldats spartiates face à l’armée perse, représentée comme barbare et décadente. Même si 100 serait le nombre des membres du collectif, soit un Guyanais sur 3 000, le lien entre le groupuscule et la fiction ainsi que la bande dessinée dont elle est issue, est certainement incarnée par l’idéologie véhiculée : un penchant pour l’ordre et la lutte contre la barbarie, personnifiée par l’Autre. Enfin, « Frères, parce que la Guyane est notre mère », explique Mancée[53].

« Pères de famille », « frères », fils de la « mère » génitrice, êtres de sexe masculin, virils assumés, ces hommes en uniforme ont revendiqué leurs xénophobie, classisme, paternalisme et sexisme. Ils étaient prêts à en découdre, à tuer, à faire la « guerre » aux étrangers, aux pauvres (les squatteurs par exemple) et à protéger « leurs » femmes, sœurs, mères. L’émergence de ce groupe a fait écho à la situation en Afrique du Sud, où, nous allons le voir, les manifestations xénophobes et la violence vont croissant, et, en raison des cagoules et du besoin de dissimuler les visages, aux actions des groupes fascistes et des commandos militaires ou policiers.

Plus globalement, la situation critique qu’a vécue le gouvernement français à cette époque a abouti à la mise en exergue de ce groupuscule manifestement peu progressiste. L’écho qui en a été fait dans la presse et l’importance qui a été donnée par l’État à ce groupe révèlent un choix politique éloigné de la mise en exergue des luttes anticapitalistes, anticolonialistes, anti-impérialistes existantes. On a assisté à une forme d’instrumentalisation des mouvements sociaux et par là même à la dépolitisation de leurs actions et revendications ainsi qu’à une mystification viriliste et militariste de la contestation. En outre la « protection » des femmes a servi d’alibi aux opérations de force.

Ce choix politique s’inscrit dans une histoire et un contexte anciens. La Guyane connaît une violence extrême et des modes de socialisation qui y sont liés : les relations interpersonnelles ne peuvent se faire que sur le terrain de la violence et ceci relève de l’histoire coloniale post-esclavagiste du département français. L’héritage des relations sociales hiérarchisées imposées par l’esclavage, inhumain, institutionnalisé par l’État et central à l’organisation des territoires dits d’« outre-mer » pendant plus de trois siècles, se traduit aujourd’hui dans les rues de Cayenne, Kourou, Remire-Montjoly, Matoury, etc. La violence entre sexes, classes, races et « autochtones »/migrants traduit des rapports de domination entre État et territoire, État et populations, populations entre elles.

La double approche des médias classiques et responsables politiques hexagonaux qui a consisté d’une part à mépriser la population guyanaise, son quotidien, ses pensées et expressions, et d’autre part à accorder une place de choix à un groupuscule aux pratiques militarisées, xénophobes, sexistes, caractérise leur volonté politique majeure d’exclure le débat, la contestation, l’exercice de la citoyenneté et la démocratie de la scène publique, à la périphérie (outre-mer/hors occident) comme au centre (hexagone/occident).

L’Afrique du Sud : une société xénophobe armée

Fin mars 2015, Goodwill Zwelithini, roi de la nation zoulou, a appelé « les étrangers à faire leurs bagages et à s’en aller »[54]. Cet appel, a alors généré une vague de manifestations xénophobes dans tout le pays et fait sept morts parmi les demandeurs d’asile et réfugiés mozambicains, malawites, somaliens, zimbabwéens…, majoritairement des Africains et pour la plupart des commerçants[55]. Le roi considère les Zoulous comme ses sujets et s’est disculpé à cet égard de tous les incidents violents survenus et a dit ne leur avoir jamais ordonné d’attaquer des étrangers : « Si j’avais dit ça, il ne resterait plus rien ! »[56]. Il a ainsi manifesté sa toute puissance, autant que sa haine, sans pour autant condamner les nombreux crimes.

Deux semaines après les déclarations du roi, Gwede Mantashe, secrétaire général de l’ANC, encourageait le gouvernement à « durcir l’application des lois sur l’immigration »[57], c’est-à-dire à renforcer les mesures prises l’année précédente. Il a proposé l’établissement de camps de réfugiés pour mieux contrôler les « étrangers illégaux ». Il a abondé dans le sens du monarque pour ne pas avoir contredit ses propos. Dans la même semaine, Edward Zuma, fils du président alors en exercice, lui-même Zoulou, a déclaré être en accord avec le roi pour « déporter les étrangers hors d’Afrique du Sud »[58]. L’homme politique a associé « tous les étrangers » à des hommes – êtres de sexe masculin – malfaisants : trafiquants de drogue, voleurs d’emploi, intrinsèquement meurtriers car anciens soldats, clandestins…[59] À propos des supposées armes que ces étrangers porteraient manifestement sur eux en raison de leur passé militaire (étrangers originaires de pays en conflit), Zuma junior a argumenté : « En Afrique du Sud, vous devez détenir un permis de port d’armes pour pouvoir porter une arme à feu. Où sont leurs licences ? Nous ne pouvons pas exclure la possibilité d’un coup à venir. Le gouvernement doit nettoyer quiconque qui réside dans le pays illégalement. Ils ont besoin de partir »[60]. Il a ainsi fustigé les « étrangers » en tant que dealers et meurtriers : « Ils sont la raison pour laquelle il y a tant de drogue dans le pays Ils approvisionnent et vendent de la drogue aux communautés dans notre pays. Prenez Radovan Krejcir [un fugitif tchèque accusé avec trois autres du meurtre d’un Libanais] par exemple, il est venu dans le pays parce qu’il savait qu’il pourrait commettre un crime et sortir librement »[61]. Il a également mis en avant la menace de la sécurité nationale : « Je ne parle pas seulement des étrangers en provenance des pays africains, je parle également des Asiatiques et Européens. Ils représentent une réelle menace pour la sécurité dans ce pays, et la police ne peut pas les attraper parce qu’ils ne peuvent pas être retrouvés, parce que certains d’entre eux ne possèdent pas les papiers requis »[62].

Edward Zuma a associé la présence des « étrangers », pris comme un groupe uniforme, potentiellement armé, à une menace contre le pays. Il a ainsi renforcé une thèse selon laquelle l’Afrique du Sud serait « victime » de son histoire (ségrégationniste et coloniale) et en incapacité de faire face à ladite menace. Il a d’ailleurs ajouté : « La raison pour laquelle je dis ça, c’est que certains étrangers travaillent pour des entreprises privées de sécurité où ils ont été employés à bas prix. Ces entreprises sont en train de se détourner des lois sud-africaines du travail »[63]. En plus d’être de potentiels assassins, les « étrangers » seraient les principaux acteurs d’un détournement de la loi sud-africaine[64].

Après trois semaines d’émeutes, le 16 avril 2015, le gouvernement a pris la parole. Jacob Zuma s’est d’une certaine manière inscrit dans le sillage de son fils. Devant les parlementaires, il a appelé à « l’arrêt des violences » et a déclaré : « Aucun degré de frustration ou de colère ne peut justifier des attaques contre des ressortissants étrangers ou le pillage de leurs magasins »[65]. Le 18, il a annulé un voyage officiel en Indonésie et a affirmé dans un camp de réfugiés à Durban, ville portuaire où ont démarré les attaques contre les « étrangers » : « Ce ne sont pas tous les Sud-Africains qui disent que vous devez partir mais une très petite minorité. […] Il ne peut y avoir de justification aux attaques contre les étrangers »[66]. Le 21, le président en exercice a opté pour une nouvelle position : les attaques des Sud-Africains contre les étrangers sont dues à l’apartheid et à l’ignorance. Il a rappelé à la presse les thèses sur la violence comme seule système de socialisation hérité du régime ségrégationniste[67] : « L’erreur est de ne pas leur avoir enseigné que l’apartheid est désormais du passé et qu’il n’y a plus besoin d’avoir recours à la violence face à l’autre »[68].

De son côté, Julius Malema, président du parti Economic Freedom Fighters (EFF) depuis 2013, a choisi la piste institutionnelle, une façon de contrer son ancien allié, Jacob Zuma. Selon le leader politique, seul l’État serait responsable de la situation xénophobe et violente. Le 16 avril, il a déclaré que « L’État, étant l’aîné de l’ensemble de la société, devient responsable de toute la violence infligée contre nos ressortissants étrangers »[69]. Il a ajouté pendant les quelques minutes où il a eu la parole : « C’est à travers l’État qu’on a dit à notre peuple que la résolution des différends devait passer par la violence. C’est sous votre direction que lorsque vous n’avez pas été d’accord avec les gens de Marikana, vous les avez tués parce que vous n’avez jamais cru à la résolution pacifique des différends »[70]. Il a précisé que lorsque le EFF a été en désaccord avec le parti au pouvoir au Parlement l’année précédente, il a également appliqué la violence.

Le 19 avril, Malusi Gigaba, ministre de l’intérieur, a déclaré à son tour : « Nous lançons un sérieux avertissement à ceux qui participent à des actes de violence publique. Nous vous trouverons et vous aurez à faire face à la loi dans toute sa rigueur »[71]. Il a ainsi affirmé l’option juridique du gouvernement. À ce propos, rappelons qu’en matière d’immigration, les lois nationales se sont, depuis ces dernières années, durcies. Dans la pratique, et comme le rappelle Achille Mbembé, les permis de travail ne se renouvellent pas, les visas sont refusés à des membres d’une famille. « Une situation kafkaïenne »[72], ajoute le philosophe camerounais, qui s’étend aux étudiants « étrangers » qui sont entrés légalement dans le pays, avaient leurs visas renouvelés, mais qui se trouvent désormais dans une insécurité juridique, incapables de s’inscrire et d’accéder à l’argent auquel ils ont droit et qui leur avait été alloué par les Fondations. Selon le philosophe, il s’agit de nouvelles mesures anti-immigration, par lesquelles le gouvernement entend transformer les immigrés légaux en clandestins. Achille Mbembé parle de véritable pogrom[73], de dette de l’Afrique du Sud à l’Afrique. Le terme utilisé, « détruire, piller » en russe, fait directement référence au crime et bien évidemment à l’extermination des Juifs avant la IIe Guerre mondiale en Europe.

Plus récemment et après la première Operation Fiela en 2015 qui visait largement les immigrés clandestins et a forcé des milliers d’entre eux à quitter le territoire sous prétexte de lutte contre la xénophobie, le nouveau ministre de l’Intérieur, Fikile Mbalula, a lancé le 23 janvier 2018 pour une durée d’un an, la deuxième phase de l’opération, appelée Fiela 2, qui vise à lutter contre le crime, notamment par le démantèlement des « gangs »[74]. Cette deuxième version vise comme la première la chasse aux clandestins. Lors de son lancement, les discours des dirigeants nationaux ont continué à nier la situation délétère, à entretenir l’amalgame entre crime et migrants, à cacher la réalité de la violence sud-africaine, dans un but purement électoraliste.

Pourtant, dans ce pays, les meurtres par balle arrivent en tête des causes de mort violente et placent, en 2012, le pays en deuxième position mondiale après les États-Unis[75]. Même si le taux d’homicides sud-africains a baissé depuis l’avènement de la démocratie, il demeure un des plus hauts du monde : il est sept fois supérieur au taux mondial avec 34 pour 100 000 personnes en 2015 (contre 5,3 pour 100 000 au niveau mondial pour la même période)[76]. En outre, le South African Police Service (SAPS) a arrêté de publier des données sur ces meurtres par armes à feu en 2000[77], si bien que depuis les statistiques sur les armes à feu sont partielles et spéculatives et qu’il est donc difficile de cartographier les auteurs des crimes par exemple. Or, une des tendances observées dans l’Afrique du Sud post-apartheid est le taux d’armes passées des agents de l’État aux mains de criminels, à travers les vols, la négligence, la fraude et la corruption. Le Secrétariat de la police a déclaré en mars 2015 que plus de 1 900 armes à feu appartenant à la police, aux forces de défense et des prisons avaient disparu en 2014[78].

Le 8 février 2018, l’organisation Hate Crimes Working Group rendait publique une étude[79] sur les mesure, nature et incidence des crimes xénophobes en Afrique du Sud. Cette recherche, portant sur 945 cas de crimes de haine, de discours haineux ou de discrimination intentionnelle à l’égard de « groupes vulnérables et marginalisés » dans les provinces du Cap Oriental, Gauteng, Limpopo, KwaZulu-Natal et Cap occidental, a établi que « moins de 42% des victimes sont originaires d’Afrique du Sud, 28% proviennent d’un pays d’Afrique orientale et 18% d’un pays d’Afrique centrale. Trois pour cent des cas impliquent des victimes des pays du sud de l’Afrique [à l’exclusion de l’Afrique du Sud]. Les asiatiques non nationaux ont également ciblés dans 8% des cas. 15 victimes originaires des pays ouest-africains sont impliquées »[80]. L’âge des victimes varie entre zéro et 81 ans, et 22 victimes sont des nourrissons ou enfants de moins de 18 ans. Au moins 35% des cas concernaient des victimes gays ou lesbiennes et 8% concernaient des victimes transgenre, et parmi elles les femmes[81]. Les auteurs des crimes étaient souvent connus de la victime ou faisaient partie de la communauté où le crime avait été commis. Selon Yolanda Mitchell, « De tous les cas que nous avons étudiés, deux cas sur trois n’étaient pas signalés à la police et seulement 62 cas ont abouti à un jugement, pour lequel 16 condamnations avaient pour motif la haine ». L’étude montre par ailleurs que la majorité des victimes ne portent pas plainte parce qu’elles ne fait pas confiance à la police et a peur d’être arrêtée. Les victimes auraient également dit que le Service de Police servait uniquement les citoyens sud-africains.

 

La montée de la xénophobie en Afrique du Sud fait apparaître plusieurs stratégies politiques. L’idée poursuivie par Edward Zuma était de rejeter les problèmes socio-économiques et politiques que connaît le pays depuis de nombreuses années (chômage endémique, paupérisation de la population, pandémie du sida, crise politique de l’ANC…)[82], sur une catégorie sociale : les « étrangers », pour la plupart des réfugiés, économiques, politiques, hommes et femmes, pour certains victimes de massacres, de viols, etc. Dans la foulée, l’exercice permettait de revaloriser les natifs et en particulier les membres de l’ethnie Zoulou, majoritaire et dominante. Cette revalorisation passe par leur victimisation, c’est-à-dire par la mise en exergue de leur potentielle menace/mise en danger par un groupe social qui leur est étranger. On retrouve ici une dialectique masculiniste[83] développée par son père, Jacob Zuma, qui rejette les femmes en tant que groupe, appelle à leur répression dans le but de rendre aux hommes noirs zoulous leur force virile, menacée à la fois par l’Occident et les féministes. L’exemple mis en avant du port des armes à feu par les « étrangers » et de ses conséquences sur la population est à ce titre édifiant car, comme nous le verrons infra, les hommes sud-africains n’ont pas attendu l’afflux de réfugiés pour tuer massivement leurs épouses, sœurs, nièces… en particulier par balles. Le discours d’Edward Zuma démontre une forme de dénégation de la violence endémique du pays, produite par ses propres dirigeants, construite sur l’histoire de la circulation des armes et héritée du passé ségrégationniste et colonial du pays.

La position défendue par Jacob Zuma, quant à lui, n’est pas neuve. Plutôt que désigner les auteurs des agressions et meurtres comme des criminels, elle les place en victimes. Elle entérine la place de subalterne du sud-africain noir pauvre, incapable de penser par lui-même, de prendre la parole, qui demanderait à être éduqué, car affublé d’un héritage colonial ségrégationniste qui l’empêche de vivre « normalement ». Elle confirme la division du pouvoir entre l’élite – qui siège, prend les décisions, fait les lois – et la « base », démunie. Elle reproduit ainsi les rapports de pouvoir tels qu’ils étaient établis à l’époque coloniale. De plus, elle oblitère le caractère sexué, et plus généralement situé, des actes : qui sont les auteurs ? des hommes, des femmes ? noirs, métis, blancs ? pauvres, riches ? jeunes, moins jeunes ? hétérosexuels, LGBT ? L’objectif de l’ancien président est là encore, mais de façon plus nuancée que son fils, de faire de l’homme noir pauvre jeune inactif hétérosexuel des townships sud-africains un individu social masculin à protéger, une victime plutôt qu’un acteur, qui plus est violent, de la gestion de sa société. Et, par ricochet, tout en faisant le mea culpa du pouvoir politique en place, il restreint sa responsabilité à la faiblesse des politiques d’éducation alors que d’autres choix politiques déterminent l’ampleur du fléau : libéralisme[84], corruption, négligence des politiques de santé, etc. Zuma disculpe le parti au pouvoir, l’ANC, maintient ainsi l’hégémonie en place et réaffirme la hiérarchisation des relations sociales qui traverse la société sud-africaine. Cette stratégie emprunte les codes militaires : ordre, hiérarchie, élitisme, morale.

Julius Malema entend de son côté reporter la responsabilité politique des événements sur le seul parti au pouvoir, l’ANC. Il occulte les propos du roi des Zoulous, du fils de l’ancien président, et se sert du concept de violence pour expliquer le dysfonctionnement d’une société en transition. Il n’évoque pas davantage les politiques économiques, d’immigration et d’alliance avec les différentes ethnies pour assurer la paix sociale. Il parle encore moins de l’exacerbation du sentiment de supériorité sud-africaine dont il a amplement facilité la propagation lorsqu’il faisait partie des proches du président Zuma. Il omet de rappeler en quoi il a contribué à renforcer le sentiment d’émasculation des hommes noirs de la « base », une violence en tant que telle, dont le seul but était de renforcer un parti en perte de vitesse, l’ANC. Cette stratégie contradictoire s’inscrit dans l’héritage violent et militarisé des luttes de libération nationale : armées, réprimées par les emprisonnements, tortures, assassinats, etc. des militants anti-apartheid.

En outre, les incidents de 2015 rendent compte des tactiques militaires de la police, qui apporte peu son soutien aux victimes, voir intervient de façon musclée pour réprimer les manifestations anti-haine[85] et ne produit pas de statistiques désagrégées. Plus tôt, une grève de mineurs à Marikana en 2012 avait été brutalement réprimée par la police, qui avait tué 34 personnes, sous les ordres supposés de l’actuel Président de la République Cyril Ramaphosa[86], alors administrateur du groupe britannique Lonmin, propriétaire de la mine de platine de Marikana. Cette situation constitue une réminiscence des violences policières sous l’apartheid.

L’ignorance de l’Afrique du Sud que mentionne Achille Mbembé est ce qu’on pourrait qualifier de produit d’une violence réelle et épistémique héritée du passé colonial du pays. Cette violence est en outre entretenue par l’ANC depuis son arrivée au pouvoir. Le jeu de concurrence entre États, d’Occident et du « Sud », mais aussi du « Sud » entre eux, a maintenu dans ce pays le besoin de créer un « modèle », supérieur, aujourd’hui hégémonique en Afrique. La colonialité du pouvoir fonctionne[87], ajustant chaque rapport de domination – de classe, de race, de genre – au service de cette ambition nationaliste, accompagnée d’une option capitaliste libérale tenace. Les « étrangers » s’en retrouvent d’emblée ciblés, de façon violente, tout autant que les femmes pauvres noires de la « base », car considérés comme des « menaces » à la transition, de fait très hiérarchisée et élitiste, de la société sud-africaine.

Turquie : l’armée au service de l’Empire

Quelques heures après le coup d’État du 15 juillet 2016, la chaîne CNN Turk relayait l’appel de soutien du Président de la République Recep Tayyip Erdoğan auprès de milliers de civils[88]. Les jours suivants, beaucoup d’entre eux descendaient dans la rue, souvent en criant Allah Akbar, autant de clameurs reprises et répercutées par les haut-parleurs de toutes les mosquées du pays[89]. Tout semblait être prêt comme les listes de purge : les militaires, l’appareil d’État, la presse… Le 22 juillet 2016, une semaine après les événements, le président instaurait l’État d’urgence pour trois mois[90]. À coup de décrets, il organisait une purge interne au pays. Il étendait à trente jours le délai de la garde à vue et dans sa lancée suspendait son engagement de respecter la Convention européenne des droits de l’homme. L’éventail de la répression s’est alors ouvert. On a compté 18 699 gardes à vue, 10 137 incarcérations, plus de 80 000 fonctionnaires mis à pied, dont près de la moitié d’enseignants. Parmi eux, 6 000 officiers ont été arrêtés, près de 3 000 policiers hauts gradés ont été écartés, 2 745 juges mis à pied, dont deux membres de la Cour constitutionnelle, des dizaines de membres du Conseil d’État, de la Cour de cassation. Un millier d’écoles, 16 universités privées, 3 agences de presse, 16 chaînes de télévisions, 23 stations de radios, 45 quotidiens, 15 magazines et 29 maisons d’édition ont été sommés de cesser leurs activités, et leurs biens confisqués. 1 550 doyens de facultés ont été démis de leurs fonctions, 1 200 associations et fondations, une vingtaine de syndicats interdits, une centaine de résidences universitaires ont été fermées et confisquées[91]. Le 29 juillet la purge s’est étendue au secteur privé. Le président du conglomérat familial Boydak Holding, a été arrêté en même temps que deux dirigeants de son groupe et des mandats d’arrêt ont été délivrés contre l’ex-président du groupe qui avait des intérêts dans l’énergie, la finance et les meubles[92]. Le lendemain, les combats ont repris contre les Kurdes de Turquie. Bilan : huit morts dans les rangs de l’armée turque et 35 parmi les combattants du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), selon l’État-major qui accuse le PKK d’avoir attaqué[93]. Excédé, Erdoğan a annoncé : « Le président veut introduire une petite réforme constitutionnelle [au Parlement] qui, si elle est approuvée, fera passer le service national de renseignement [MIT] et les chefs d’état-major [de l’armée] sous le contrôle de la présidence »[94].

Parallèlement, des organisations sont apparues sur les réseaux sociaux numériques, telles que « AKmilisler » (milices AK), « AKgençlik » (jeunesse AK). Elles ont rejoint les « Osmanlı Ocakları » (Les foyers ottomans) et les « Osmanlı Ocakları 1453 », deux organisations informelles de l’Adalet ve Kalkınma Partisi (Parti de la justice et du développement ou AKP), qu’Erdoğan préside. L’ensemble de ces groupes ont lancé sous le hashtag #AKsilahlanma (AKarmement) des appels à s’armer[95]. Les propos tenus ont réclamé une nécessaire sécurisation des militants pro-régime contre le terrorisme, cadres, voire ministres… et ont appelé à l’armement civil. La prolifération des armes à feu et les demandes de port d’armes avec permis ont augmenté dans le but de « contrer les coups d’État », écrivait le journaliste Aydın Engin le 23 novembre 2016 dans le quotidien d’opposition Cumhuriyet[96], sans qu’aucune autorité politique ne démente ni ne condamne cette situation. Melih Gökçek, maire d’Ankara métropole a alors déclaré dans une émission télé : « Il y a eu un armement extraordinaire. Ils achètent des fusils à pompe et les mettent dans leurs maisons. Si demain tu essaies de faire un coup d’état avec fusil militaire et Kalash, ceux là viendront en face de toi avec leur fusil à pompe. Ils ont enfin compris. Le monde essaie de nous piéger. Faut-il qu’un coup d’état se déroule, et qu’ils disent, ‘je vais attendre qu’on vienne me tuer’ ? » [97]. La tentative de coup d’État aura au moins débouché sur la légitimation du port d’armes et de leur utilisation dans le but de justifier une menace dont les dirigeants ou leurs soutiens seraient la cible.

Qu’il soit un acte raté de l’opposition, un acte prémédité et autogéré du pouvoir autoritaire, un règlement de compte avec les Kurdes, le résultat de manigances au plus haut niveau afin de contrôler une région à forte plus-value stratégique et militaire, ce coup d’État a également permis à Erdoğan d’obtenir les pleins pouvoirs et, officiellement, à mettre à genou ceux qui jusqu’en 2013 l’ont soutenu et amené là où il est : la confrérie de l’imam Fethullah Gülen, du nom du prédicateur installé aux États-Unis depuis 1999. Meilleur allié de l’AKP, dans sa conquête du pouvoir et tout au long du processus de la mise au pas de l’armée, de la police et de la haute magistrature turque dominées depuis les années 1920 par l’élite kémaliste, laïque et anticléricale, la confrérie avait rompu les ponts avec son protégé en décembre 2013 par le lancement opportun d’une campagne dénonçant sa corruption et celle de son gouvernement[98].

Six mois plus tôt, du 28 mai 2013 et pendant trois semaines, « les révoltes de Gezi », mouvement de protestation contre un projet immobilier qui aurait mené à la destruction du parc de Gezi à Istanbul, avaient enflammé la jeunesse turque, et s’étaient rapidement étendues à tout le pays, avec pour mot d’ordre la lutte contre les politiques répressive et islamiste du pouvoir – Erdoğan était alors Premier ministre –, ses dérives traditionalistes et ses impacts dont les féminicides. Les manifestations avaient été violemment réprimées par la police[99]. Depuis et en raison de l’état d’urgence, la place Taksim est interdite de manifestations, en particulier pour le 1er mai, le 8 mars, ou la Gay Pride.

 

Dans l’histoire de la Turquie, la situation n’est pas nouvelle. Plus d’un siècle auparavant, entre les 1er et 3 avril puis les 12 et 14 avril 1909, le parti Jeunes Turcs, au pouvoir après un coup d’État un an auparavant, faisait tuer entre 20 000 et 30 000 Arméniens (non musulmans) à Adana[100], un centre économique florissant. Les motivations de ces massacres : des questions religieuses, sociales et économiques. Le 1er novembre 1914, le sultan Mahomet V déclarait la guerre[101], ce qui donnait l’occasion au pouvoir de mettre en place son projet d’épuration ethnique : sous prétexte de déplacer les populations pour des raisons militaires, les Arméniens ont été déportés vers Alep en Syrie dans des conditions telles que la plupart sont morts en chemin. Le génocide arménien aura lieu d’avril 1915 à juillet 1916 et coûtera la vie à un million deux cent mille Arméniens, soit les deux-tiers de la population arménienne vivant en Turquie à l’époque[102].

Ensuite, depuis la fondation de l’État moderne en 1923, l’armée représente la première force politique du pays[103]. Avec la police, cet organe de répression turc, n’est jamais très loin du pouvoir politique. Tout au long du XXe siècle, elle est intervenue régulièrement, soit pour directement prendre le pouvoir (en 1960 et en 1980), soit pour asseoir un gouvernement civil sous strict contrôle militaire (en 1971 et en 1997)[104]. Cette structuration militariste de l’État est un héritage du kémalisme : la République non démocratique mais « laïque », au sens de la soumission de la religion à l’État (et non de la séparation de la religion et de l’État), entend que l’islam sunnite soit sous contrôle d’une bureaucratie d’État, que le tiers des musulmans turcs qui ne sont pas sunnites soient exclus, et que les seules autres religions reconnues (et également sous contrôle) soient le judaïsme et les églises chrétiennes orthodoxes et arméniennes[105].

Aujourd’hui, l’armée turque est la deuxième plus importante de l’Otan, après les États-Unis, avec 77 000 soldats professionnels et quelque 325 000 conscrits[106]. Au sein de l’Alliance atlantique, l’État turc jouait depuis la proclamation du Califat – existence de Daesh (EI) – et jusqu’à peu longtemps, un rôle de tremplin. Il répondait aux exigences des États-Unis, comme par exemple fermer ses frontières à l’EI, accueillir sur son sol les réfugiés fuyant la guerre en Syrie et faire ainsi bonne impression auprès de l’UE[107]. On observe aujourd’hui et depuis le coup d’État quelques dérapages et prises de distance[108]. Le président et sa famille se permettent quelques écarts. Bilal Erdoğan, fils du président, est à la tête du groupe BMZ, une série d’entreprises mises en cause dans la signature de contrats de transport avec des entreprises européennes d’exploitation afin d’acheminer vers différents pays d’Asie le pétrole irakien volé par l’EI[109]. Cette opération rapporte ainsi entre un et deux milliards de dollars de revenus annuels à l’organisation terroriste et s’effectue en violation des résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies. Sümeyye Erdoğan, fille du président, fait fonctionner un hôpital clandestin en Turquie tout près de la frontière syrienne[110]. Les camions de l’armée turque y acheminent tous les jours des dizaines de blessés djihadistes de l’EI, les soignent et les renvoient au front en Syrie.

Par ailleurs, le président turc mêle systématiquement affaires privées et publiques. En 2001, Burak, son fils aîné, épouse la fille d’un homme d’affaires qui aura participé à la société créée par Erdoğan dans le domaine de la marine marchande[111]. Cette première création sera suivie d’autres, permettant ainsi « un redéploiement discret des activités économiques du Premier ministre [Erdoğan à l’époque], après sa sortie du secteur de la distribution »[112]. En 2003, son fils cadet, Bilal, se marie avec une fille de bonne famille, ce qui lui permet de se lancer dans le secteur des cosmétiques, puis à son tour dans le transport maritime[113]. En 2004, sa fille aînée, Esra épouse Berat Albayrak, fils d’un journaliste islamiste, soutien inconditionnel du président. Formé aux États-Unis, Berat possède et dirige ATV, l’une des chaînes de télévision privée la plus regardée en Turquie. Devenu député du Parti de la justice et du développement (AKP) en juin 2015, il occupe depuis le portefeuille de l’Énergie et des Ressources naturelles[114]. Enfin, le 14 mai 2016 Sümeyye Erdoğan, la fille cadette de Erdoğan, épouse Selçuk Bayraktar. Détenteur d’un doctorat du Georgia Institute of Technology aux États-Unis, ingénieur dans le domaine de la défense, ce nouveau gendre travaille depuis 2007 comme directeur technique à Baykar Makina, l’entreprise familiale qui produit pour l’armée turque des Bayraktar (drones)[115], si chers à la politique de défense du pays, et qui les fournit à l’armée syrienne dans le cadre de ses opérations au sud-est du pays contre les rebelles du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), en guerre contre Ankara depuis 1984[116].

Le père du marié est un ami du président depuis les années 1990, alors qu’ils militaient ensemble, d’autant qu’il est originaire d’une ville proche de Rize, dont Erdoğan provient. Le témoin du marié est le chef d’état-major depuis le 18 août 2015, Hulusi Akar. Sa présence lors de la cérémonie témoigne de la connotation militaire de l’événement. Cette option est amplifiée par les invitations du Premier ministre pakistanais et du fils de l’émir du Qatar[117]. En effet, en mars 2015, dans le cadre de la guerre syrienne, se crée une nouvelle alliance militaire, Jaish Al-Fatah (Armée de la conquête), regroupant des combattants djihadistes, salafistes et proches des Frères musulmans. Ce regroupement serait le produit du pacte scellé entre l’Arabie saoudite, le Qatar et la Turquie, sous l’impulsion du roi saoudien Salman, au pouvoir depuis janvier de la même année[118]. La présence de l’émir et du magistrat pakistanais constituerait alors un message adressé au Congrès américain, notamment opposé à la livraison par les États-Unis de F-16 au Pakistan[119]. Ce mariage signe alors l’entrée du secteur militaire, longtemps inaccessible aux islamistes turcs, dans la famille Erdoğan.

 

L’État turc jour alors plusieurs jeux. En interne, il utilise la violence militaire et l’érige en système : la violence d’État est licite alors que la contre-violence (manifs, tribunes, …) est illicite. Cette violence est entretenue pour des raisons de solidarité par des milices, très militarisées, dont les activités entraînent le renforcement de la circulation des armes à feu. En externe, les turbulences au sein des alliances armées indiquent les velléités du désormais tout puissant président de reconstruire un Empire ottoman.

Une culture de guerre tenace

La Guyane, département français d’outremer, l’Afrique du Sud, la Turquie ont en commun la montée d’un nationalisme qui stigmatise, dans les deux premiers pays, « l’étranger » comme cause des écarts de richesse, du chômage, des inégalités, et dans le dernier cas « l’opposant au régime » comme responsable de l’instabilité sociale, économique et politique. On assiste dans les trois pays à la généralisation de la violence et à la banalisation de la culture de guerre. Le contrôle brutal des migrants/opposants politiques se fait, suivant les pays, par l’État lui-même, des pans de populations qui s’autodéterminent autochtones/natifs ou par groupuscules armés ou fascisants interposés. Ces instigateurs ont en commun la « lutte contre l’insécurité ». Les populations « nationales » seraient menacées et à ce titre en besoin de protection. Elles deviennent des victimes alors qu’elles sont majoritaires et dominantes. Cette assertion résulte davantage d’un postulat que de la réalité et traduit une idéologie archaïque. L’hostilité manifeste à l’égard des étrangers/opposants au régime demeure une stratégie conforme à l’établissement de frontières, réelles ou symboliques, transmissibles d’une génération à l’autre, stratégie empruntée à l’histoire des conquêtes et à son lot de conflits armés. Il s’agit d’isoler, voire d’anéantir, des populations (mouvements sociaux, militants anti-corruption, antinationalistes ou antireligieux, féministes) qui représentent des freins à la montée en puissance des dirigeants.

En Guyane, la responsabilité de la menace est rejetée sur la métropole, autrement dit l’État français qui aurait toujours négligé ses départements créés à l’issue de la période coloniale. En Afrique du Sud, la situation haineuse serait le résultat de l’apartheid, considéré par le gouvernement, comme une période appartenant au passé mais néanmoins responsable de la situation présente, interprétation réfutée par ses opposants qui affirment que la violence est inhérente au pouvoir (ANC) en place. En Turquie, l’insécurité trouverait son origine chez tous les opposants au président Erdoğan.

L’histoire du lien entre État et armée qui structure aujourd’hui la société turque nous éclaire dans les deux autres pays sur les conséquences délétères éventuelles de la banalisation de la notion de « menace ». La légitimation des violences, de l’utilisation des armes et des mécanismes de répression du côté des dominants, fait miroir à l’illégitimité des droits des dominés/subalternes, dont les femmes sont. La violence est appropriée par les dominants comme une norme, militaire, dont les dominés ne peuvent plus s’emparer, notamment pour contrer les dominants. On assiste alors à un amalgame entre force et violence qui prive les subalternes des moyens de leur libération. Par voie de conséquence, les subalternes sont contraints à vivre les inégalités, la domination, entendue comme rapport de commandement et obéissance, basée sur la violence[120]. L’autonomie créant « potentiel », pouvoir[121], ne peut se produire. En outre, le gouvernement turc nous éclaire sur la rentabilité financière des campagnes sécuritaires et les opportunités supplémentaires qu’elles offrent à ceux qui les mènent.

Par ailleurs, dans les trois cas, la course à la sécurité emprunte très largement les schémas du paternalisme et du masculinisme, stigmatisant « les hommes » comme des victimes et utilisant « les femmes » comme des êtres humains à soutenir, à aider, à représenter… dans le but de mieux rendre invisibles leurs pratiques ou pensées. Les femmes n’auraient pas de capacité propre à prendre la parole, à rendre compte des situations inégalitaires et à opposer un regard spécifique aux néolibéralisme et néocolonialisme. Elles sont, en tant que classe[122], instrumentalisées au service d’une force, mâle, étatique ou réactionnaire, qui, en utilisant les armes, des-historicise et décontextualise les conflits. À ce titre, l’utilisation de la force dépolitise les rapports de domination en œuvre car comme le souligne Geneviève Fraisse « il n’y a pas de politique sans histoire »[123]. Cette dépolitisation est concomitante au réarmement des populations et des États. Ce couple – dépolitisation et réarmement – fait partie intégrante d’une dialectique propre à la militarisation qui produit des relations sociales inégalitaires, entretient la division sexuelle et la généralisation de la violence.

Des budgets et lois subordonnés aux forces armées et à leurs valeurs

Par les exemples précédemment cités pour chaque pays de notre étude, nous avons pu approcher la fabrique de la militarisation des sociétés, et en particulier le développement de la « culture de guerre ». Nous allons maintenant démontrer par l’énoncé des budgets alloués à la défense et des différentes lois votées au niveau national en quoi la France, la Turquie et l’Afrique du Sud entretiennent une ambivalence entre force et violence, sous-entendue par cette militarisation : nous allons montrer en quoi le « désarmement » organisé des subalternes au profit d’une minorité jouissant d’un droit permanent à porter des armes et à en user impunément, interroge en permanence les usages des termes « sécurité » et « violence ».

Des budgets militaires ciblés

France : une budgétisation en adéquation avec l’option sécuritaire

Selon le rapport annuel Jane’s du cabinet spécialisé IHS Markit publié en 2017, le pays occupe la 7e place derrière la Russie en matière de budget militaire avec 45,6 milliards de dollars dépensés[124]. D’après le Global Firepower 2017[125], la France est la 5e puissance militaire mondiale[126] après la Chine et l’Inde. D’après une étude française de 2015[127], elle est la 3e puissance nucléaire mondiale, après les États-Unis et la Russie. En 2017, la France devient le troisième exportateur d’armement[128] : le pays a enregistré 5,2 milliards de dollars de livraisons. Il n’est devancé que par les États-Unis (26,9 milliards de dollars) et la Russie (7,2 milliards)[129].

Le 10 juillet 2017, Gérald Darmanin, ministre français de l’Action et des Comptes Publics, annonçait quelques chiffres (pas tous) visant une réduction du budget national 2017 de 4,5 milliards d’euros[130]. Cette réduction différait selon les lignes et se présentait comme suit (en millions d’euros et dans l’ordre décroissant) : 850 pour la Défense, 282 pour les Affaires étrangères, 268 pour l’Économie, 216 pour les Relations avec les collectivités territoriales, 160 pour la Justice, 60 pour la Présidence de la République, 75 pour l’Enseignement scolaire, 50 pour la Culture, 46,5 pour la Politique de la ville, 7,5 pour l’Égalité entre les femmes et les hommes. On ne connaîtra pas les chiffres relatifs à de la santé, à la sécurité nationale (police), à la recherche, etc. Les échos dans la presse française concernant la baisse des dépenses militaires – le plus gros chiffre – ont fleuri. La baisse des crédits pour les droits des femmes – le plus ridicule – a fait l’objet de quelques manchettes, comme celles des collectivités territoriales, grâce notamment à la mobilisation associative.

Nous allons nous intéresser à l’analyse de ces montants avec une perspective genrée. Commençons par les ratios réduction/budget alloué. La réduction du budget de l’égalité femmes/hommes représente 25,15% de son budget global[131], alors que celle de la Défense atteint 2,01%, ce qui représente la 7e position dans les missions touchées par les réductions, derrière la Présidence de la République (60%), l’Égalité entre les femmes et les hommes donc, l’Économie (11,66%), la Politique de la ville (11,17%), l’Action extérieure de l’État (9,32%), les Relations avec les collectivités territoriales (5,78%) (voir tableau de référence ci-dessous). Ajoutée à celles de la Politique de la ville et des Relations avec les collectivités territoriales qui touche particulièrement les associations de femmes (« populations vulnérables »), la baisse de crédits pour l’égalité entre les sexes s’avère alors très importante.

Ensuite, ramenée à la proportion de la mission « égalité femmes/hommes » au budget national (0,0067% et 6e taux le plus bas derrière le Haut Conseil des finances publiques, la Cour de justice de la République, le Conseil supérieur de la magistrature, le Conseil constitutionnel, les Appels en garantie de l’État (crédits évaluatifs) et devant notamment La Chaîne parlementaire, 0,0078%, ou encore la Sécurité et éducation routières, 0,0087%…), l’effort demandé est 12,5 fois supérieur à celui de la Défense (9,48%, 2e rang le plus élevé après l’Enseignement scolaire – défraiement du personnel inclus). Pourtant, à titre d’exemple, le 12 juillet 2017, le dernier rapport annuel faisant état des inégalités entre les deux sexes dans les services de l’État, des collectivités, et des hôpitaux en 2015 restait sans appel : on compte seulement un tiers de femmes aux postes à haute-responsabilité et les écarts salariaux se comptent en centaines d’euros, quand ils ne dépassent pas le millier[132].

 

Tableau de référence

Mission Budget 2017 (en millions d’euros)[133] % Budget global Réduction budgétaire 2017 en millions d’€[134] % Réduction/budget mission Réduction ramenée à part budget (en millions d’euros) Ratio des réductions Ratio des réductions/Défense
Présidence de la République 100 0,02% 60 60,00% 2674 560,35 29,82
Égalité entre les femmes et les hommes 29,82 0,0067% 7,5 25,15% 1121 234,84 12,50
Économie 2299 0,52% 268 11,66% 520 108,87 5,79
Politique de la ville 416 0,09% 46,5 11,17% 498 104,35 5,55
Action extérieure de l’État 3024 0,68% 282 9,32% 416 87,07 4,63
Relations avec les collectivités territoriales 3734 0,84% 216 5,78% 258 54,02 2,87
Défense 42245 9,48% 850 2,01% 90 18,79 1,00
Culture 3021 0,68% 50 1,66% 73 15,46 0,82
Justice 10837 2,43% 160 1,48% 66 13,79 0,73
Enseignement scolaire 70043 15,71% 75 0,11% 5 1,00 0,05
Total 445753   4500 1,01%      

 

Notons par ailleurs que le projet de Loi de programmation militaire couvrant la période 2019-2025, présenté le jeudi 8 février 2018 en Conseil des Ministres et qui devrait être votée par le Parlement durant l’été, comprend une hausse budgétaire en rupture avec les tendances présentées concernant l’effort de défense : budget moyen de 39,6 milliards d’euros par an sur les cinq années à venir (le budget 2018 est de 34,2 milliards d’euros alors qu’il bénéficie déjà d’une hausse de 1,8 milliard)[135].

 

Ce décryptage arithmétique confirme que les arbitrages budgétaires ne sont pas aveugles au genre et s’inscrivent en droite ligne de la disparition du ministère des Droits des femmes et pour l’Égalité femmes-hommes et de son allocation budgétaire très faible. Il révèle des inégalités structurelles selon les secteurs et en particulier en matière d’égalité femmes/hommes. Malgré quelques exemples d’ordre rhétorique ou communicationnel, l’État français continue à enrayer l’intégration du genre dans les politiques publiques (faute de budget), et par ricochet, vise la destruction, pour cause de disparition, des associations féminines ou féministes subventionnées. De plus, en orientant les projecteurs sur l’armée, le gouvernement du pays vise une campagne idéologique qui amplifie l’affrontement/antinomie entre militarisation de la société et émancipation des femmes. Ce choix participe d’un sexisme d’État.

En Afrique du Sud, un virage vers le social qui cache une augmentation de l’option sécuritaire

Pour la période 2017-2018, le budget des forces armées sud-africaines (South African National Defence Force – SANDF) s’élevait à 3 457 millions de dollars (2 805,37 millions d’euros), soit environ 1% du PIB[136]. Au cours de la période 2016-2017, près de 56,5% de ce budget était alloué aux salaires (75 500 militaires)[137]. Le ministre des Finances du nouveau gouvernement, Malusi Gigaba, nommé le 31 mars 2017, souhaiterait réduire le budget à environ 0,98% du PIB pour la période budgétaire à venir[138] en visant explicitement la baisse des effectifs à hauteur de 74 660 à échéance de 2020-2021.

La majorité des postes du budget 2018 sont en augmentation par rapport à 2017 à l’exception du développement économique (13,7 milliards d’euros) qui baisse de 20% et des services publics généraux (4,374) qui baissent de 10,47%. Le poste Défense est en réduction de 11,57% (3,308 contre 3,691 milliards d’euros) mais les autres organes (police, lois, affaires privées) sont en augmentation.

 

Tableau de référence

Mission Budget 2018 (en milliards de rands)[139] En milliards d’euros  En% du budget global Budget 2017 (en milliards de rands)[140]  en milliards d’euros En % du budget global Mouvement
ECONOMIC DEVELOPMENT 200,1 13,677 11,98% 241,6 16,513 14,47% -20,74%
Economic regulation and infrastructure 97,9 6,691 5,86%
Industrialisation and exports 32,9 2,249 1,97%
Agriculture and rural development 30,2 2,064 1,81%
Job creation and labour affairs 23,3 1,593 1,40%
Innovation, science and technology 15,8 1,080 0,95%
PEACE AND SECURITY 200,8 13,724 12,02% 198,7 13,581 11,90% 1,05%
Police services 99,1 6,773 5,93% 93,8 6,411 5,62% 5,35%
Defence and state security 48,4 3,308 2,90% 54 3,691 3,23% -11,57%
Law courts and prisons 45,4 3,103 2,72% 43,8 2,994 2,62% 3,52%
Home affairs 7,9 0,540 0,47% 7,2 0,492 0,43% 8,86%
GENERAL PUBLIC SERVICES 64 4,374 3,83% 70,7 4,832 4,23% -10,47%
Public administration and fiscal affairs 40,4 2,761 2,42%
Executive and legislative organs 16 1,094 0,96%
External affairs 7,6 0,519 0,46%
DEBT-SERVICE COSTS 180,1 12,310 10,78% 62,4 4,265  3,74%  65,35% 
LEARNING AND CULTURE 351,1 23,997 21,02% 320,5 21,906 19,19% 8,72%
Basic education 230,4 15,747 13,80%
University transfers 34,9 2,385 2,09%
National Student Financial Aid Scheme 22,8 1,558 1,37%
Skills development levy institutions 19,3 1,319 1,16%
Education administration 16,8 1,148 1,01%
Technical and vocational education and training 10,7 0,731 0,64%
HEALTH 205,4 14,039 12,30% 187,5 12,815 11,23% 8,71%
District health services 90,2 6,165 5,40%
Central hospital services 38,6 2,638 2,31%
Provincial hospital services Other health services 34,3 2,344 2,05%
Facilities management and maintenance 8,5 0,581 0,51%
Municipal equitable share 33,8 2,310 2,02%
COMMUNITY DEVELOPMENT 196,3 13,417 11,75% 195,8 13,383 11,72% 0,25%
Municipal equitable share 62,7 4,285 3,75%
Human settlements, water and electrification programmes 56,5 3,862 3,38%
Public transport 38,6 2,638 2,31%
Other human settlements and municipal infrastructure 38,5 2,631 2,31%
SOCIAL DEVELOPMENT 259,4 17,730 15,53% 180 12,303 10,78% 30,61%
Old-age grant 70,5 4,819 4,22%
Social security funds 66 4,511 3,95%
Child-support grant 60,6 4,142 3,63%
Disability grant 22,1 1,510 1,32%
Provincial social development 20,6 1,408 1,23%
Policy oversight and grant admin 9,8 0,670 0,59%
Other grants 9,7 0,663 0,58%
Total 1670 114,142 100,00% 1560 106,624 93,41% 6,59%

 

Les arbitrages budgétaires du nouveau gouvernement, qui s’accompagnent d’une augmentation importante de la TVA, mettent l’accent sur les politiques de développement social mais, en baissant drastiquement le développement économique, cachent un biais dans l’appréciation du contexte marqué par des taux de pauvreté et de chômage très importants[141]. Par ailleurs, l’augmentation des postes de police et des affaires privées laisse apparaître le choix de politiques répressives au regard de l’augmentation constante de la violence, et en particulier des violences xénophobes et domestiques. L’heure n’est pas encore au rééquilibrage des richesses, à la lutte structurelle contre la corruption et à la pacification des relations sociales. En outre, aucun poste budgétaire n’est dédié à l’égalité des genres.

En Turquie, une stratégie militaire modernisée et personnalisée

Depuis, le 7 novembre 1985, l’État turc s’appuie sur la loi n° 3238 afin de développer ce que l’article 1 de cette loi précise : « une industrie de défense moderne ». L’objectif est la modernisation des forces armées et leur autosuffisance[142]. Ainsi, en 2012, 60% des composants des matériels de défense turcs étaient produits localement, contre seulement 25% en 2003 et 37% en 2006[143]. Cette montée en charge est rendue possible par l’existence du Fonds de soutien à l’industrie de défense (Savunma Sanayii Destekleme Fonu, SSDF), institué au sein de la Banque centrale de la République de Turquie et par le Trésor turc qui garantit chaque année un certain niveau de dépenses. En 2016, ces dépenses s’élevaient à 4,11 milliards d’euros, soit la moitié des crédits affectés à la défense (8,2 milliards d’euros en 2016)[144]. Cependant, les sommes réellement engagées par le Fonds sont en moyenne estimées 1,7 milliards d’euros[145]. En parallèle, grâce à la loi n° 4691 du 26 juin 2001 portant sur les Zones de développement technologique et à la loi n° 6676 du 16 février 2016[146], dont l’objectif est d’accroître de 1% à 3% la part des activités de R&D dans le PIB, l’État turc a attiré les investissements dans les hautes technologies par le biais d’incitations et d’exemptions fiscales[147]. Cette réforme a également porté les subventions publiques à hauteur de 50% pour l’achat de machines et d’équipements employés à des activités de R&D[148]. Au total, la Turquie dépense environ 1 milliards d’euros en R&D de défense, soit 0,1% de son PIB et 11% du budget de défense (hors pensions complémentaires et hors dépenses du Fonds de soutien à l’industrie de défense)[149]. Entre 2007 et 2014, ces investissements ont augmenté de 257%, avec une part autofinancée fluctuant en 2010 entre 21,5% et 44,7%, le pourcentage le plus élevé ayant été atteint en 2008[150]. Depuis 2011, ce ratio diminue, l’industrie prenant à sa charge un tiers (32,7%), puis un quart des dépenses (25,9% en 2012 et 25,6% en 2013). Toutefois, la part autofinancée reste élevée par rapport à ce qui peut notamment être observé en France[151]. Grâce à ce soutien étatique, l’industrie de défense turque s’est développée et a gagné en autonomie.

Le budget 2018 acte les augmentations des budgets du ministère de la Défense et de la Gendarmerie, en hausse de 40% chacun par rapport à 2017, hausses les plus significatives introduites en 2018 dans l’administration publique turque[152]. À titre de comparaison, le ministère de la Jeunesse et des Sports verra son budget augmenter de 22%, celui de la Santé de 12%, de l’Éducation 9%, de la Direction des Affaires religieuses 12%[153]. Si on cumule tous les postes liés à la sécurité nationale (Défense, gendarmerie, sécurité, etc.), le budget total alloué atteint 17,974 milliards d’euros, soit le deuxième poste budgétaire après l’Éducation nationale et loin devant la santé (plus du double) ou encore les affaires sociales (plus du triple).

 

Tableau de référence

Mission Budget 2018 (en milliards d’euros)
Éducation nationale 19,7
Défense 8,6
Santé 7,97
Direction générale de la sécurité 5,90
Famille et politiques sociales 5,68
Jeunesse et Sports 3
Justice 2,91
Gendarmerie 2,83
Affaires religieuses 1,64
Affaires étrangères 1,55
Culture et tourisme 0,83
Agence de renseignements 0,5
Environnement et Urbanisme 0,40
Présidence 0,18
Commandement des garde-côtes 0,14
Ordre public et à la sécurité 0,004

 

Le 25 février 2018, lors de l’inauguration de la quatrième édition du salon de défense Armed Forces Exhibition for Diversity of Requirements and Capabilities (AFED) à Ryad, Ismail Demir, sous-secrétaire turc de l’Industrie de défense a vanté les réussites des industries de défense turques en affirmant que son pays aurait atteint les 65% d’autosuffisance dans le domaine militaire[154]. Il a évoqué des « projets communs » entre son pays et l’Arabie saoudite et a indiqué que la Turquie pouvait désormais aider les Saoudiens à atteindre leurs objectifs : « En travaillant ensemble, nous pouvons réduire le coût du processus, améliorer les installations et approfondir certaines zones spécifiques (…) Nous travaillons sur plusieurs projets ambitieux tels que la guerre électronique, la communication électronique, l’aviation et l’industrie marine et sous-marine »[155].

 

Les options sécuritaires du gouvernement turc sont confirmées. Elles se complètent par des notions de performance et de modernisation, notamment basées sur le tout numérique. Cette préférence doit être mise en lien avec la pénurie d’effectifs dans la plupart des corps militaires mais aussi dans les administrations, pénurie consécutive à la purge de 2016. Elle va de paire avec la concentration des pouvoirs qui mise sur le contrôle des médias, infrastructures, administrations, etc. pour se maintenir, elle-même complétée par une mégalomanie familiale, imprégnée de culture militaire.

Une sécurité de contrôle et à haute plus-value financière

En France, la vraie-fausse annonce mi-2017 de la réduction du budget militaire par le nouveau gouvernement Macron s’accompagne d’une réelle réduction des fonds alloués à l’égalité femmes/hommes. Cette équation symbolise une ambition politique plus encline à miser sur la « sécurité du territoire », ou plus explicitement la « culture de guerre », qu’à éradiquer les violences ou les discriminations dont les femmes sont quotidiennement les objets. En Afrique du Sud, le nouveau gouvernement vise la baisse du budget militaire et contrebalance cette réduction par l’augmentation des moyens sécuritaires intérieurs, au détriment du développement économique à l’origine des écarts de richesse et des violences multiples. L’État turc a opté pour l’autonomisation et la modernisation de son armée, ce qui a entraîné des augmentations successives des budgets militaires. Cette double option s’accompagne d’un objectif personnel d’enrichissement du président qui, par famille interposée, contrôle les entreprises privées du secteur et celles qui les soutiennent.

Bien que l’Afrique du Sud n’affiche pas de course à l’armement au niveau international, à la différence des deux autres pays, elle a en commun d’orienter son budget vers des politiques sécuritaires, ce en quoi elle rejoint la France et la Turquie. On constate dans ce cas l’expression politique d’une différenciation entre besoin de sécurité nationale externe et interne. Néanmoins, dans les trois pays, on assiste au choix de privilégier le contrôle brutal des populations et le développement des violences, au détriment d’options pacifistes ou égalitaires, notamment en termes de genre.

Des lois en faveur de la militarisation

En France, un code du travail et un état d’urgence de concert

La commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale française a adopté le jeudi 13 juillet 2017 le projet de loi visant à réformer le code du travail. Les neuf articles de ce texte ont été examinés du mardi soir au jeudi matin, selon un chronométrage très serré – une « urgence […] dictée par notre situation économique et sociale »[156], a argumenté la ministre Muriel Pénicaud pendant la séance. Les 120 amendements principalement déposés par les députés du parti La France insoumise ont été étudiés, mais tous ont été rejetés, sans qu’aucun élu du parti au pouvoir, La République en marche, à l’exception de la présidente de la commission et du rapporteur du texte, ne prenne la parole.

Par cette loi, le gouvernement a souhaité « rénover » le « modèle social » en suivant deux principes essentiels, « liberté » et « sécurité »[157]. Par ces mots, on peut lire entre les lignes de l’exposé des motifs de la loi, « libérer » les chefs d’entreprises qui souhaitent licencier plus facilement ou négocier dans leur société de nouvelles règles jusqu’alors interdites par la loi, notamment le contrat de chantier qui n’ouvre pas droit à indemnité. La ministre cible la simplification du droit du travail et argue qu’il faut « partir du principe que quelque chose de trop compliqué est un droit inaccessible, que la complexité nuit à la réalité du droit effectif »[158]. Dans ce cadre, par « sécurité », il s’agit de comprendre « sécuriser » juridiquement les règles du licenciement, notamment plafonner les sommes que peuvent toucher les salariés aux prud’hommes en cas de licenciement abusif, ou fusionner des instances représentatives du personnel, ou réformer le compte pénibilité et simplifier « les obligations de déclaration » des employeurs. Parmi les articles adoptés, notons en particulier le premier, qui prévoit le recours aux ordonnances qui permet au gouvernement d’inscrire dans la loi, et dès septembre 2017, un champ très large de mesures – dont l’autorisation des modifications du contrat de travail par des négociations d’entreprises ou de branches, jusqu’alors réservé au niveau de la loi – et cela sans plus de consultation.

Cette action politique, voulue par le président Macron, tant par sa méthodologie, son contenu et sa rhétorique a connu des critiques abondantes, notamment sur la libéralisation à outrance du droit du travail français, sur la remise en cause de « 120 années de lutte » syndicales[159]. S’ajoute l’augmentation du retard français en matière d’égalité professionnelle et de précarité des femmes[160].

En outre, le 16 février 2018, le Conseil constitutionnel a validé l’essentiel du dispositif de la loi du 30 octobre 2017 transposant dans le droit commun les assignations à résidence de l’état d’urgence[161]. Créé en 1955 pour faire face aux événements liés à la guerre d’Algérie, l’état d’urgence a été appliqué trois fois durant cette période. Il est ensuite appliqué trois fois en outre-mer durant les années 1980, puis en 2005, en raison d’émeutes dans les banlieues, et enfin entre le 14 novembre 2015 et le 1er novembre 2017 en raison des risques d’attentats. Resté en vigueur 719 jours, cette mesure d’exception a pris officiellement fin le mercredi 1er novembre et a permis de transférer au ministère de l’Intérieur des pouvoirs réservés à l’autorité judiciaire. Certaines dispositions spéciales permises par ce régime d’exception sont restées en vigueur parce que transposées dans le droit commun par la loi antiterroriste votée à l’Assemblée nationale le 3 octobre. Quatre mesures sont concernées : les assignations à domicile, les perquisitions administratives, les zones de sécurité et la fermeture des lieux de culte[162].

Pendant ce temps, Macron intégrait les lois d’exception dictées par l’état d’urgence dans la constitution, refusait de participer aux négociations onusiennes sur le traité d’interdiction des armes nucléaires[163] alors qu’il est adopté par 122 États[164], qualifiait le traité de « texte […] inadapté au contexte sécuritaire international »[165], faisait pression auprès de l’OCDE pour que les dépenses en matière de sécurité et d’opérations de maintien de la paix soient prises en compte dans l’aide publique au développement[166] alors que des eurodéputés dénonçaient la militarisation de cette aide au développement[167], organisait une réunion du G5 Sahel afin de mettre à contribution des États africains dans le lancement d’une « force militaire contre les terroristes islamiques »[168], donnant ainsi un coup de fouet au projet de hausse du budget militaire à hauteur de 2% du PIB[169], se nommait chef des services secrets[170], et s’entourait aux DGSE, DGSI, « cellule anti-EI » d’amis de promotion[171]

 

Forts de la grille d’analyse proposée par Andrée Michel, nous saisissons que la façon dont la réforme du code du travail a été introduite (consultation expéditive des députés, mutisme ordonné de la majorité présidentielle), son contenu, à savoir les libéralisations des droits des chefs des entreprises privées accompagnées des régressions en matière de droits des salariés (primauté des ordonnances, accords de branche versus application de la loi), la rhétorique utilisée (« réalité » versus « conception bureaucratique », « partage » (entre employeurs et salariés) versus « contrat », « dialogue » versus « négociation », etc.[172]), se combinent pour remplir les colonnes des médias (tv, radio, presse) dans une opération de captation de l’attention de l’opinion publique, et en particulier de la contestation. De plus, en visant la « simplification » du dialogue social ou de la procédure pénale[173], le gouvernement assure la restructuration du travail et amplifie la hiérarchisation des relations sociales, notamment entre hommes et femmes.

De plus, remonter les Champs-Elysées avec un véhicule militaire lors de son investiture en tant que Président de la République[174], prolonger l’état d’urgence, prévoir de faire de cet état d’exception la règle, nommer une ministre des Armées plutôt que de la Défense (inédit depuis 1965), quadriller policièrement les manifestations de façon systématique, démontrent une volonté politique sécuritaire oppressive. Sous des allures de jeune premier, un brun séducteur, « intellectuel », le chef d’État français entend ainsi réduire les libertés des citoyens de son pays. Si on ajoute à cette observation la disqualification des bavures policières (dont l’usage d’une matraque télescopique par la BST qui rappelle quelques pratiques militaires de torture), ou encore le déni des contestations outremer, on constate un ensemble d’opérations de propagande, à visée épistémique, qui accompagne le renforcement du parti pris oppressif. La peur induite par le plan Vigipirate, vécue dans les gares, les écoles, les stades, les salles de concert, les hôpitaux, en devient banalisée. Elle est voulue comme faisant désormais partie du quotidien des citoyens. Ceux d’entre eux les plus touchés par la violence produite, et en particulier les femmes, sont moins impliqués au travail, salarié, voire domestique, ou de façon moins dynamique, ce qui augmente la division sexuelle. De plus, la présence des armes, des militaires dans les lieux publics est souhaitée comme rassurante face à une potentielle menace terroriste. Ces mécanismes, ajoutés aux arbitrages budgétaires, induisent une transformation des rôles sociaux, d’acteurs à victimes, de sujets à objets, ainsi qu’une réorientation des valeurs, répression versus dialogue, ordre versus autonomie, instauration de la peur versus paix, domination versus égalité, virilité et masculinisme versus ouverture d’esprit et contestation.

La militarisation de la société française suit son cours, avec à sa tête, un chef d’armes forgé par sa mission : faire la guerre, directe et latente, et dépolitiser les débats. L’ordre, la hiérarchie, l’élitisme, la morale sont désormais au calendrier des Français, de leurs élus et des populations des États de la périphérie de la France.

L’Afrique du Sud ou la militarisation comme source de profit

Selon le rapport annuel 2013-14 de la Private Security Industry Regulatory Authority (PSIRA – Autorité réglementaire de la sécurité privée), on compte 8 692 entreprises de sécurité privée enregistrées en Afrique du Sud[175], ce qui place le pays en 7e position des industries de sécurité à travers le monde, après l’Inde, la Chine, la Russie, le Brésil, le Japon et le Mexique[176]. 487 000 agents de sécurité privée sont en activité alors que par comparaison, la SAPS emploie 194 852 personnes et la Force de défense nationale sud-africaine (South African National Defence Force SANDF) 77 597 (hors réserves)[177]. Ce nombre d’agents de sécurité privée représente donc près du double des effectifs de sécurité de l’État. La recrudescence des actes criminels dans le pays est telle que 50% des ménages ont pris des mesures physiques pour protéger leurs foyers et 11% des ménages utilisent des services de sécurité privés[178]. De plus, l’étude « Victimes de crimes de 2016-2017 » produite par l’Institut des statistiques a montré que la confiance de la population dans la capacité de la police à résoudre des crimes a régulièrement baissé[179]. En 2011, 64% de la population avait confiance dans la police ; ce chiffre a chuté à 58,8% en 2015-16[180]. La peur du crime a conduit à l’augmentation du nombre de sociétés apportant des réponses militarisées dans les banlieues des villes, auprès de résidents prêts à payer de larges sommes à des unités appelées d’« intervention tactique ».

Bien que souvent requises pour effectuer des opérations semblables à la police, les sociétés de sécurité privées ne sont pas soumises au même contrôle ou surveillance. La PSIRA est l’organisme mis en place pour réglementer cette industrie selon les termes de la loi sur la réglementation de l’industrie de la sécurité privée (Private Security Industry Regulatory Act 56 of 2001). La PSIRA est financée par les cotisations de ses membres et fonctionne comme un organisme indépendant. Sous la présidence Zuma, un projet de loi a visé à limiter la propriété étrangère des entreprises de sécurité privée à 49%[181]. Selon les nombreux détracteurs de ce projet (aujourd’hui encore à l’ordre du jour), les clauses de cette loi viendraient en violation des engagements de l’Afrique du Sud concernant l’Accord général sur le commerce des Services (AGCS) de l’Organisation mondiale du commerce (OMC)[182]. Le ministre de l’Intérieur de l’époque, Nkosinathi Nhleko, a alors défendu la loi, argumentant qu’elle servait les intérêts de la sécurité nationale[183].

Derrière ces intérêts, l’État entend redresser son économie, s’assurer une croissance rapide, absorber un secteur privé rentable et une industrie dégageant des profits à hauteur de 31,1 milliards de Rands (2,12 milliards d’euros) [184], de quoi compenser ou expliquer la baisse du poste « Défense et sécurité de l’État » dans le budget 2018. Cette volonté d’absorption étatique rend compte de l’option néolibérale de l’État depuis la présidence de Mbeki qui vise le profit à court terme. Elle exclut la résolution des problèmes endémiques, la montée des violences, voire s’appuie sur ces problèmes pour bâtir son projet économique. Ce choix joue sur l’opposition étranger/national pour se justifier, institue/avalise les inégalités de richesse – entre ceux qui peuvent et ceux qui ne peuvent pas payer pour leur sécurité privée –, et les inégalités entre victimes et auteurs des crimes, une très grande majorité de femmes noires pauvres (voir infra). Il offre une bonne illustration de ce qu’Andrée Michel décrit comme étant les « fonctions latentes » du SMI.

En Turquie, des lois militaires

Lors du coup d’Etat du 15 juillet 2016, l’État a immédiatement voté des décrets visant à placer l’armée sous le total contrôle du ministère de la Défense et du Président de la République Recep Tayyip Erdoğan, alors qu’elle était jusqu’alors autonome du pouvoir politique[185]. Par exemple, les écoles de cadets (écoles militaires secondaires de type internat) dépendent depuis du ministère de l’Éducation, les hôpitaux militaires de celui de la Santé. Par ailleurs, les élèves des lycées religieux ont accès à une carrière militaire. En outre, 10 000 officiers ont été limogés dont près de 200 généraux, soit plus de la moitié d’entre eux. Pourtant, selon l’état-major, à peine 1,5% des forces armées avaient été impliquées[186]. La situation est donc critique au point que l’armée est désormais en sous-effectif. Le développement de la R&D, et notamment la production de drones armés et non armés (véhicule aérien sans pilote local), viennent en partie combler cette défaillance.

Le processus de contrôle de l’armée avait commencé au début des années 2000, avec l’ouverture des négociations d’adhésion à l’Union européenne. En 2007, l’état-major avait tenté de bloquer sans succès la candidature à la présidence de la République d’Abdullah Gül, alors proche du président. L’armée a ensuite été affaiblie par les procès lancés en 2010 contre des centaines de hauts gradés pour de présumés complots visant à renverser le gouvernement de l’AKP[187].

Ensuite, la réforme constitutionnelle approuvée le 16 avril 2017 suite à un référendum a élargi les compétences du chef de l’Etat[188]. Même si la nouvelle loi n’entrera en vigueur qu’en 2019, au moins deux des dix-huit articles approuvés par les électeurs ont immédiatement été mis en œuvre. Le chef de l’État est devenu le leader de son parti et a nommé douze des quinze membres de la Cour constitutionnelle et six des treize membres du Haut Conseil des juges et procureurs[189]. Le Parlement choisit les sept autres. Le président contrôle le pouvoir exécutif nommant lui-même, les ministres et un ou plusieurs vice-présidents. Les députés, dont le nombre passe de 550 à 600, sont dans leur majorité de la même couleur politique que le président. Pour limiter le risque de cohabitation, les élections législatives et présidentielles sont simultanées et se dérouleront tous les cinq ans, contre quatre auparavant. Le président dispose d’un droit de veto sur la promulgation des lois[190].

Par ailleurs, suite à l’audience d’un accusé lors du procès “FETÖ” (organisation terroriste de Fetullah) portant un t-shirt arborant le mot « Hero », Erdoğan a, lors de son discours pour la commémoration du 15 juillet 2017, annoncé : « J’ai parlé récemment avec notre Premier ministre, je lui ai dit, quand ceux-là [les accusés] se présenteront devant le tribunal, amenons-les comme à Guantanamo, avec des uniformes »[191]. Le président a réitéré ses propos le 5 août, lors de l’inauguration du stadium de Hatay : « Mais maintenant à ceux-là, nous apportons la tenue unique. La tenue unique ! Comme couleur, vous voyez amande ? Il sera couleur amande, en un peu plus foncé. Il sera de deux types. Il y aura une combinaison. Et il y aura une veste-pantalon. Une partie de ceux-là, disons les putschistes, porteront la combinaison, et les autres, c’est à dire les terroristes, porteront la veste et le pantalon. À partir de maintenant, ils ne peuvent plus s’habiller comme ils veulent et venir [au tribunal] comme ça. Et ceux-là, se feront afficher, de cette façon, à la face du monde »[192]. Cette tenue unique est celle de l’uniforme porté par les prisonniers dans les années 1980 (dictature militaire), qui avait fait l’objet d’une longue et intense résistance, de luttes juridiques et grèves de la faim dans les prisons, ce qui avait abouti à sa suppression.

Enfin, le 2 août 2017, le Conseil militaire suprême dirigé par le Premier ministre a décidé de destituer les chefs des trois armées : armée de terre, marine et aviation. Le chef de l’état-major reste en place jusqu’en 2019. Le chef de l’armée de terre est remplacé par le chef des forces de la gendarmerie, celui de l’armée de l’air par le chef de l’unité de défense balistique à la base aérienne d’Eskisehir, celui de la marine par un vice-amiral, autant de militaires sous la houlette du président[193].

 

L’ensemble des lois votées suite au coup d’État de 2016 est un héritage. Elles s’inscrivent dans la longue histoire de la construction de la Turquie, marquée par son attachement à l’armée, à l’ordre, à la défense du territoire, à la discipline. Pinar Selek l’avait déjà analysée dans son livre « Devenir homme en rampant »[194], en étudiant le rôle décisif du service militaire dans son pays. À travers de nombreux témoignages, elle avait décrit le lien antre « virilité » et service militaire, décrypté le rôle social de la violence, institutionnelle, à vocation « pédagogique », et établi l’imbrication entre re-production des sociétés autoritaires et hiérarchiques, construction d’une classe dominante des hommes et organisation de l’oppression des femmes. Les accents despotiques et antidémocratiques donnés par Erdoğan à travers l’ensemble des lois qu’il a fait voté ne sont que l’expression la plus farouche d’un système militarisé, existant de longue date. Ce système connaît des impacts spécifiques, notamment sur les femmes, privées par ricochet des libertés les plus élémentaires.

De l’assujettissement et des discriminations des citoyens à l’inutilité des militaires

Le début du mandat Macron a d’emblée été marqué par une série de lois formant un ensemble conjugué de symboles forts de la militarisation : le jumelage de la restructuration du travail et du contrôle militaire de la Nation (état d’urgence). Cette stratégie a instauré la peur comme commun aux citoyens français, une morale de l’assujettissement, qui a pour conséquence directe l’appauvrissement de la contestation intra muros et la réponse guerrière aux conflits militaires hors frontières. En Afrique du Sud, le choix néolibéral continue à servir de guide pour légiférer, privilégiant conjointement des politiques sécuritaires intérieures et une absorption nationale, voire nationaliste, lucrative du secteur. Ces politiques incluent le désarmement des étrangers, négligeant celui des nationaux, voire le renforçant, d’où les conséquences délétères sur les subalternes (migrants, femmes) du territoire. La ressemblance avec le passé colonial et ségrégationniste du pays est frappante, les colons ayant utilisé cette stratégie pour mieux assujettir les colonisés. En Turquie, l’héritage militaire structurel a dicté l’ensemble des lois et décrets votés après le coup d’État dans le but de concentrer les pouvoirs entre les mains du président. En plus des restrictions des libertés des citoyens, cette généalogie est à l’origine d’options militaires modernes qui entérinent la restriction des personnels militaires au profit de l’utilisation de l’intelligence artificielle (IA) lors des guerres ouvertes. Là encore, ce pays nous informe des équilibrages nouveaux adoptés par le SMI. Dans l’armée, l’utilisation des machines (de guerre), plus communément nommées « armes autonomes », se substitue à celle des humains afin d’accélérer les guerres à une échelle renforcée[195], ce qui entérine l’idée d’une volonté d’élimination affermie des citoyens, sans plus de droits d’objectivisation et de contestation, et leur directe mise en péril, à l’intérieur ou à l’extérieur des frontières.

Féminicides, instrumentalisation du ventre des femmes, résultats de la militarisation

Avec la militarisation, la « violence » est érigée en norme dans les relations politiques. L’inégalité et la force faisant loi, les stratégies gouvernementales bien que perdantes – par exemple, plus les femmes sont violentées moins elles sont impliquées au travail, salarié, informel ou domestique, ou de façon moins dynamique –, s’obstinent. Ces stratégies entérinent les violences économiques et les violences physiques qui sont concomitantes. En outre, la pauvreté ou l’appauvrissement créent de l’oisiveté et de la rancœur, en particulier chez les jeunes garçons, alors prêts à faire la démonstration de leur virilité.

Qu’elles soient explicites ou tabous, les violences de genre sont banalisées, tolérées, plus ou moins tues, dans des sociétés où la satisfaction du plaisir sexuel masculin est soit affirmée comme centrale pour l’équilibre politique national, fragilisé à l’échelle internationale (Afrique du Sud, Turquie), soit exprimée à travers l’homophobie ou la disqualification de la réalité des violences faites aux femmes (France). Dans les différents pays, elles traduisent une situation de crise, à facettes multiples, où les rapports de force au niveau national/public se transposent au niveau privé, dans les relations sexuelles entre hommes et femmes. Le personnel est bien politique[196] et les féminicides en représentent une expression. La nécessité exacerbée pour les hommes d’affirmer leur pouvoir sur les femmes par la violence révèle un déséquilibre social mais aussi démocratique. Ce déséquilibre peut s’expliquer par l’accélération des échanges, qu’ils soient économiques, politiques ou culturels, la surenchère sécuritaire et le besoin d’affirmer une force dans le privé à opposer à une menace dans le public, l’embouteillage des influences épistémiques et le jeu de concurrence que ces croisements produisent.

De plus ce déséquilibre reproduit les rapports de domination de sexe, de race, de classe. Jules Falquet analyse à cet effet les féminicides survenus depuis 1993 dans la ville frontalière du nord du Mexique, Ciudad Juárez, et précise qu’une partie de ces crimes visent ouvertement des jeunes travailleuses prolétaires, majoritairement issues de la migration du sud du pays[197]. Les assassinats constituent une manière de terroriser la main d’œuvre ; ils n’ont pas seulement une dimension misogyne, comme il en est fortement question dans les manifestations de dénonciation, mais aussi raciste et classiste[198]. Désensibilisant graduellement la population face à tant de cruauté, ces féminicides ont précédé, et ouvert la route à, la terrible « guerre contre le narco-trafic » lancée par le gouvernement en 2007, qui a fait plus de morts et de disparus que les dictatures du Cône Sud des années 70. Par ailleurs, Falquet évoque les luttes des Indiennes et des Métisses au Guatemala, qui affirment les liens entre logiques économiques néolibérales et appropriation du corps des femmes, entre « intensification de l’exploitation des ressources » et « déploiement d’une violence considérable et multiforme »[199]. Le lien entre développement des violences de genre et subalternisation connait dans le cadre de la militarisation un éclairage spécifique.

En définitive, le corps des femmes est soit une source de problème (surpopulation), soit une marchandise (prostitution), soit un défouloir (féminicides), un champ de bataille (viols), une cure (se soigner en ayant des rapports sexuels avec des vierges), un lieu sain/saint (mutilations génitales féminines, mariages précoces), un bien de l’État (développement du tourisme sexuel), un produit de vente des sociétés privées (assurances viol), un bien/matrice (utérus, lieu de re-production), une arme (rapport sécurité/menace), rarement une propriété de son habitante[200]. En Afrique et ailleurs, peu de femmes vivent leurs corps comme une propriété. L’absence du droit à disposer de son corps et l’inexistence symbolique du corps féminin en tant que sujet ne sont pas des faits nouveaux mais sont encore plus tolérées par les sociétés contemporaines où elles se manifestent de façon précipitée et répétitive, accélérée et en surenchère, à travers les discours publics des dirigeants politiques mais aussi dans la réalité quotidienne.

En France, Turquie, Afrique du Sud, cette appropriation du corps des femmes est désinhibée au plus haut niveau de l’exercice du pouvoir politique. Qu’elle soit la manifestation de l’héritage du colonialisme et maintenant de la mondialisation et de l’occidentalisation, la violence infligée aux femmes reste une norme, légitimée par l’option militariste. Parce que cette norme rencontre quelques débats ou stratégies de contournement, notamment de la part de féministes, elle est renforcée par une rhétorique dominante, qui continue à entretenir une vision paternaliste des femmes, et se traduit par des actes criminels au quotidien de la « classe des hommes » contre la « classe des femmes »[201].

Un État français colonialitaire, mêlant militarisation et subalternisation des femmes

Le 8 juillet 2017, lors d’une conférence de presse en marge du sommet du G20 à Hambourg, un journaliste ivoirien demandait au Président de la République français s’il fallait un « plan Marshall » pour « sauver l’Afrique ». Emmanuel Macron a alors répondu : « Le défi de l’Afrique, il est totalement différent, il est beaucoup plus profond. Il est civilisationnel aujourd’hui. Quels sont les problèmes en Afrique? Les États faillis, les transitions démocratiques complexes, la transition démographique qui est l’un des défis essentiels de l’Afrique, c’est ensuite les routes des trafics multiples qui nécessitent des réponses aussi en termes de sécurité et de coordination régionale, trafic de drogue, trafic d’armes, trafic humain, trafic de biens culturels et c’est le fondamentalisme violent, le terrorisme islamiste, tout cela aujourd’hui mélangé, crée des difficultés en Afrique. En même temps, nous avons des pays qui réussissent formidablement, un taux de croissance extraordinaire qui fait dire à certains que l’Afrique est une terre d’opportunités. […] Quand des pays ont encore aujourd’hui 7 à 8 enfants par femme, vous pouvez décider d’y dépenser des milliards d’euros, vous ne stabiliserez rien »[202].

Très tôt après cette déclaration, les critiques se sont concentrées, en France, et plus largement en Occident ou encore en Afrique sur la question de la fécondité des « femmes africaines ». On a parlé de « vision colonialiste »[203], de « déclarations racistes »[204], d’amalgame « paternaliste et misogyne »[205] et pour Françoise Vergès d’« inversion de causalité »[206] : « On rend les femmes du tiers-monde responsables du sous-développement. En réalité, on inverse la causalité : la plupart des études prouvent aujourd’hui que c’est le sous-développement qui entraîne la surpopulation, explique la politologue. La théorie de la surpopulation évite aussi de questionner le rôle du colonialisme et de l’impérialisme dans la pauvreté. Et ces discours visent, bien sûr, avant tout les femmes. »[207] Le Nouvel Obs a même pris le soin de préciser que les chiffres énoncés ne reposent sur aucune réalité statistique : « En 2015, la Banque mondiale établissait la moyenne de l’Afrique subsaharienne à 4,9, le taux de fertilité le plus élevé du continent étant détenu par le Niger (7,6). Viennent ensuite la Somalie (6,4) puis le Mali (6,1) »[208]. Sur les réseaux sociaux numériques, beaucoup ont vitupéré le représentant de l’« élite française, mâle, blanc, riche », qui rend « les femmes africaines », « premières victimes du néocolonialisme et de l’extractivisme »[209]. Cette solidarité avec « les femmes africaines », majoritairement masculine, et la révolte féminine qui se sont manifestés ont suffi à contredire les commentaires pour le moins familialistes, qui exhortaient le président à se taire n’ayant lui-même pas « fait » d’enfants et « ayant choisi » une épouse plus âgée…

De plus, ce discours a une portée colonialitaire – qui se rapporte à la colonialité. Pour le démontrer nous allons nous intéresser aux éléments de vocabulaire utilisés par le chef d’État français. « Civilisationnel », « transition démographique », « transition démocratique », « défaillance des États », « opportunité », « États faillis », « trafic », « sécurité », « terrorisme », « violent », « mélangé », « des pays ont… ». Ces termes sont empruntés à une rhétorique qui fait partie intégrante de l’histoire des échanges entre la France, et plus généralement l’Occident/centre, et l’Afrique. Pour le centre, ce continent est notamment et depuis très longtemps un terrain d’expériences du commerce, ce qui entraîne des rapports de force tenaces et une histoire de violences : esclavagisme, guerres, conflits, répression de la rébellion, spoliations, pillages des ressources, violence comme forme de socialisation, terreur et brutalisation des femmes et des pauvres… Ces rapports de force s’accentuent en premier lieu à cause de la concurrence entre centre et Moyen/Extrême-Orient. La Chine entretient des relations avec les pays d’Afrique qui présentent une composante idéologique, le tout avec l’assentiment des deux parties : il est question de tenter de former un front commun contre l’Occident[210]. Concernant les pays arabes, la religion, loin de représenter un moteur, est utilisée comme un facteur de pénétration[211], qui contribue à l’entretien de la division sexuelle[212]. Aussi, le système classique de colonisation et des valeurs de subordination qu’il porte, incarné par le centre, représente un catalyseur afin de combler le besoin pour les pays d’Extrême et Moyen-Orient de concurrencer ce même Occident sur le terrain du néolibéralisme. En second lieu, les effets de la colonisation puis de la mondialisation sur le continent ont complexifié l’action politique. Comme le souligne Aminata Diaw, les États « ayant de moins en moins de maîtrise sur [leur] espace »[213], on observe un déplacement du politique de sa définition classique et banalisée (État, institutions) à sa définition étymologique (la gestion de la cité, entre les mains des femmes pauvres). La philosophe sénégalaise ajoute : « l’État n’est plus le centre, il est débordé par ses marges et interstices »[214], ce qui floute les frontières entre le privé et le public. Il y existe donc bien au centre, une logique militariste et libérale qui imbrique résolution des questions sécuritaires (« terrorisme », « trafic », « fondamentalisme », tous trois associés), opportunisme commercial (« opportunité », « croissance », « dépenses »), et taux de fécondité des femmes. Le centre, et en particulier la France, a toujours eu besoin et continue à avoir besoin mais de façon accrue, de la force de production/re-production féminine africaine bon marché pour rentabiliser ses investissements, qu’ils soient productifs, financiers ou guerriers et pour faire face aujourd’hui à la concurrence internationale. Comme Françoise Vergès le souligne sur sa page Facebook, « L’Afrique et le “trop” d’enfants, [n’est qu’une] remarque démontrant paresse et ignorance mâtinée d’arrogance »[215]. L’idée de « surpopulation comme responsable de la misère et des migrations, comme menace sur la sécurité, domine les débats sur la population dans le monde au début des années 1950, soit : décolonisation, guerre froide, renforcement d’un nouvel axe Nord/Sud, guerres par procuration dans le Tiers monde, discours développementaliste, tentatives de créations de coopération sud-sud »[216]. Cette idée est archaïque en cela qu’elle n’a pas su s’adapter aux bouleversements liés à la mondialisation et à l’occidentalisation et persiste à prétendre que malgré ce contexte modifié elle sert encore les intérêts économiques du centre.

Par ailleurs, l’usage de l’auxiliaire « avoir » – « Quand des pays ont encore aujourd’hui 7 à 8 enfants par femme […] » – rend compte d’une dialectique selon laquelle les pays sont les sujets de cette surpopulation et les États qui dirigent ces pays sont les propriétaires du corps de « leurs » femmes, pas même « les hommes » de ces pays. Il procède d’une idée de surpuissance des États sur les populations. Cette idée est également ancienne. De plus, ce vocabulaire impérialiste intègre des volets victimisant et paternalistes, de façon généralisée. Il est emprunté au plus haut niveau (mondial). Il est le résultat d’un choix sémantique sophistiqué. Il enferme les « femmes africaines » dans un groupe humain homogène, victime, à protéger. Sans distinction de classe, de race, de contexte géopolitique ou environnemental. Il les rend subalternes, c’est-à-dire des femmes qui ne sont pas des sujets, ne peuvent pas parler, dont la pensée n’est pas représentée[217]. En suggérant un décryptage occidental mondialisé des situations que vivent « les femmes », ce jeu sémantique fait violence épistémique[218], car il scénarise ces situations d’un point de vue occidental et non du point de vue du sujet colonisé. Il impose aux pays dits « en développement » ou « émergents » une position défensive par domination de sexe interposée. La subalternisation des femmes sert alors de base de soutènement à un mythe de rattrapage[219] imposé par le centre à la périphérie.

L’épisode de la campagne de Macron est à ce titre exemplaire. Il présente l’avantage de rendre explicite la volonté du Président de la République française de propulser son pays au premier rang d’un Occident/centre en recherche de débouchés commerciaux et idéologiques et de faire face à la concurrence moyen et extrême-orientale, notamment en Afrique. Il révèle un système qui entrelace sexisme, militarisation des sociétés et opportunisme néolibéral.

Afrique du Sud : l’héritage d’un modèle colonial violent

L’Afrique du Sud connaît une situation meurtrière aggravée confirmée en 2007 par l’Organisation mondiale de la Santé qui compte ce pays parmi les plus violents du monde[220]. Le haut niveau de criminalité et de violences est expliqué, selon Mike Brogden, « par l’héritage ségrégationniste, un legs direct du régime d’apartheid ayant institutionnalisé la violence – emprisonnements, tortures, assassinats, viols, commis en toute impunité –, ses pourfendeurs ayant utilisé à leur tour les mêmes armes comme “réponse violente” »[221]. Comme l’indique Gary Kynoch[222], la violence est, dans ce pays, une forme de socialisation, en particulier pour les Noirs car elle serait devenue le seul point de repère social, le seul mode de communication interpersonnelle[223] et le seul moyen de résoudre des conflits. La résistance qu’a engendrée ce système a induit une tolérance de la violence en tant que telle[224]. Malgré la lutte contre l’apartheid et l’avènement de la démocratie, malgré la création et le travail de la Truth and Reconciliation Commission Bill (Commission pour la vérité et la réconciliation), l’apprentissage de la pacification n’a pas encore abouti. Les conflits raciaux, de classe, de genre restent exacerbés par les inégalités de richesse entre Blancs et Noirs, hommes et femmes, toujours présentes, elles-mêmes renforcées par la situation de crise globale et une mise en concurrence économique et hégémonique spécifique du pays, en tant que modèle africain, à l’échelle internationale. Violence et conflits constituent les ingrédients d’une société héritée de son passé ségrégationniste et raciste, fortement militarisé[225].

Au sein de la violence endémique, on peut isoler des taux très importants de violences de genre. Le rapport annuel du South African Police Service[226], publié en mars 2017, montre qu’une femme en couple sur cinq (21%) a connu une expérience de violence physique de la part d’un partenaire, et 8% ont été victimes de violence physique dans les douze mois précédant l’enquête. Les données recueillies attestent que les violences sexuelles touchent plus directement les femmes noires, jeunes, divorcées ou séparées.

L’étude Understanding Men’s Health and the Use of Violence: Interface of Rape and HIV in South Africa, publiée en 2009 par le Medical Research Council (MRC), apporte un éclairage important sur la question des viols. Un jeune Sud-Africain sur quatre reconnaît avoir violé au moins une fois dans sa vie. Les violeurs comme les violées sont très jeunes (adolescents) au point qu’on pourrait estimer que le viol est considéré par ces jeunes comme le seul mode de relations sexuelles. Selon une recherche menée en 2002 sur le viol des jeunes filles pour le journal The Lancet, 21% des violeurs sont des proches, 21% des étrangers ou des connaissances récentes, et 10% des petits amis[227]. Il existe une forte causalité de proximité. Selon une enquête menée par le groupe de recherche Community Information Empowerment and Transparency, 27% des filles ou adolescentes violées par « quelqu’un qu’[elles] connai[ssen]t » ne considèrent pas l’acte comme une violence sexuelle, pas plus que les « attouchements non consentis »[228]. Cette constatation témoigne des biais dans les représentations de la violence dans ce pays, au point qu’il existe une adéquation entre sexualité et violence. Les rapports sexuels sont tellement entendus par les adolescentes comme « normalement » violents qu’il existe peu d’imaginaire de ces relations sexuelles, lié au désir, au plaisir ou à la libre disposition de son corps. De la même façon, plus d’un quart des jeunes garçons violeurs affirment que « les filles aiment être violées ». Le viol, les violences, procèdent d’une « adaptation à la survie dans une société violente ». Ils traversent les relations sociales et les dominent. La plupart des viols sont perpétrés par des Noirs sur des Noires, et à une moindre échelle par des Noirs sur des Blanches (un sur dix), celles-ci ayant davantage les moyens financiers d’assurer leur sécurité personnelle[229].

En 2015, le taux de viol réel est estimé à 80 pour 100 000, soit plus du double du taux d’homicide déjà très important pour la même période. De fait, les statistiques fournies par la police ne reflètent pas la réalité. Par ailleurs, il n’existe pas de données désagrégées par classe, sexe, race, âge. Selon Gareth Newham, responsable de la division de la gouvernance, du crime et de la justice à l’Institute for Security Studies, « les statistiques de viol du pays ne reflètent tout simplement pas la réalité vivante ». Newham les considère « insignifiantes »[230]. En outre, d’après une estimation produite par le Cape Town Rape Crisis Centre[231] en 1998, seul un viol sur vingt était reporté, ce qui amenait à plus de 1 200 000 femmes et enfants le nombre de personnes violées par an. En 2009, le Medical Research Council avait ramené ce ratio à treize[232]. Si on pondère les statistiques produites par la police à la population – 55,5 millions d’habitants – selon ce dernier ratio, on compte alors 555 555 viols en 2016-2017, soit 1 522 par jour, 63 toutes les heures, un par minute.

Le tableau sud-africain des viols est complété par celui des féminicides[233]. Ce pays connaît en 2009, selon une étude du Medical Research Council, un taux de féminicides cinq fois supérieur au taux mondial : 12,9 femmes tuées pour 100 000 – dont la moitié, 5,6 pour 100 000, tuées par un partenaire intime – contre 2,6 pour 100 000 dans le monde[234]. Selon une autre étude menée dans le cadre du programme « Prévention des violences et blessures » de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS)[235], en 2015, le taux global de féminicides est de 2,4 pour 100 000 femmes alors qu’en Afrique du Sud ce taux atteint 9,6 pour 100 000[236]. Cette estimation signifierait que le taux de féminicides de ce pays atteint désormais quatre fois le taux mondial. 1 460 femmes sont tuées par an par leur partenaire sexuel[237], soit une toutes les six heures.

Ce phénomène – le féminicide intime –, contrairement à celui plus général des homicides de femmes ne baisse pas[238]. Ces tendances, spécifiques au pays, sont confirmées par une étude publiée par l’OMS en 2002 selon laquelle entre 40% et 70% des femmes victimes de meurtres sont, dans ce pays, tuées par leur mari, compagnon ou concubin[239]. La même étude montre que le taux de victimes noires (18,3/100 000) est six fois supérieur à celui des femmes blanches agressées pour lesquelles les auteurs des crimes sont plutôt et très majoritairement des hommes de passage ou en union libre (52,10%), devant les petits amis (27,90%) et les maris (18,50%). On apprend également dans ce rapport que les femmes tuées par leur partenaire sont plus jeunes que celles qui le sont par des étrangers. Ici aussi, les principales personnes touchées par les féminicides sont des femmes noires, très jeunes et les auteurs des crimes, des hommes noirs, jeunes et très proches de la victime.

Globalement, les victimes sont tuées par balle. 66,30% des criminels possédaient légalement une arme à feu au moment du meurtre et 58% d’entre eux étaient employés dans le secteur de la sécurité. Ce constat s’ajoute à celui qui établit que 64,90% des féminicides intimes auraient pu être évités si l’auteur n’avait pas légalement possédé une arme mortelle. De plus, l’étude de 2004 du Medical Research Council montre que la grande majorité des homicides de femmes restent impunis, avec moins de 37,3% des crimes conduisant à une condamnation sous deux ans[240].

Ce phénomène des féminicides est devenu tellement important qu’en mai 2017 un hashtag, #MenAreTrash, a été créé pour dénoncer tous les cas à l’échelle nationale. L’initiative[241] a connu un succès surprenant. Il a fait suite à l’assassinat par son compagnon de Karabo Makoena, femme noire âgée de 22 ans, portée disparue le 28 avril et dont le corps a été retrouvé le lendemain brûlé et enterré dans une fosse[242]. Cette campagne n’a pas pour autant révélé une prise de conscience globale des rôles de genre ou une remise en question de la classe des hommes[243] en tant qu’agresseurs versus victimes, ou de l’incidence du patriarcat[244], en plus du racisme, sur les inégalités dans les relations sociales[245]. Elle influe peu sur les politiques publiques et les discours des dirigeants qui ignorent ce contexte militarisé, brutal et délétère.

 

Dans le panorama de ces violences de genre, il est important de souligner l’importance du rôle des armes. Selon Lyn Snodgrass, celles-ci sont ancrées dans la « psyché » sud-africaine[246], à cause de l’histoire du pays marquée sous l’apartheid par une police d’État militarisée et des conflits armés prolongés. Les armes légères et de petit calibre n’ont cessé de s’accumuler durant l’apartheid, processus favorisé en externe, notamment par l’État français. Avec les armes encore en circulation issues de la guerre froide, les caches d’armes, apparemment non déclarées en détail, et la guerre de libération armée, la période post-apartheid est caractérisée par la persistance du crime armé. La prolifération des armes et le processus de militarisation dans les régions où la violence structurelle est la norme « aggravent le dysfonctionnement de la société, les troubles politiques et minent l’autorité de l’État »[247].

S’ajoutent à la banalisation des armes dans la vie quotidienne, les discours ouvertement misogynes[248] des dirigeants politiques qui se sont succédé depuis la fin de l’apartheid et qui ont nourri à dessein le sentiment d’« émasculation »[249] de certains Sud-Africains, sentiment renforcé par celui de ne plus être capable de remplir son rôle socialement alloué de pourvoyeur de la famille puisque dans ce pays le taux de chômage masculin noir est très élevé. L’homme sud-africain noir ne serait plus un « vrai » homme. À noter que ce discours, emprunté au registre militaire – « émasculé » en opposition à « viril » –, prévalait déjà à l’époque coloniale, où « l’homme » était culturellement considéré par les colons européens en Afrique comme le seul soutien de famille alors que la réalité était tout autre, les femmes ayant toujours occupé le secteur rémunéré du commerce par exemple[250]. Ce discours n’est donc pas neuf et est réutilisé par les hommes au pouvoir afin d’ignorer les violences, et en particulier celles perpétrés à l’égard des femmes. En cela, les dirigeants justifient la subordination de la « classe des femmes » à la « classe des hommes ».

Turquie : les féminicides, une norme

Le 1er novembre 2015, un peu plus de 49% des électeurs turcs choisissaient, lors d’élections législatives, le parti de ce que les commentateurs ont appelé la « stabilité »[251]. Cinq jours plus tôt, une jeune femme de 25 ans avait été tuée par balles par des policiers parce qu’elle leur avait demandé de se déchausser avant de franchir la porte de ses parents[252]. La police avait alors plaidé la légitime défense face à une menace terroriste. Cet exemple, pris parmi beaucoup d’autres, tenterait à démontrer que la stabilité voulue par l’AKP serait conçue comme étroitement liée à la politique de sécurité et aux mesures répressives qui l’accompagnent. Les conséquences de ce choix se mesurent au quotidien.

Selon un rapport du ministère de la Justice publié en 2011[253], les « homicides de femmes » ont augmenté de 1 400% entre 2002 et 2009. Les chiffres produits annoncent que 83 femmes ont été tuées en 2003, 164 en 2004, 317 en 2005, 663 en 2006, 1011 en 2007, 806 en 2008 et 953 durant les sept premiers mois de 2009. En Turquie, trois femmes sont donc tuées chaque jour et le phénomène n’est pas récent. Il est sorti au grand jour en 2010 quand des organisations de femmes locales ont demandé à leur gouvernement « un plan d’action urgent » contre ce qu’elles ont sciemment qualifié de féminicide[254]. Selon ces mêmes organisations, les raisons de ces assassinats sont multiples. Des femmes sont tuées parce qu’elles portent des pantalons blancs, parce qu’elles ne passent pas le sel à table, parce qu’elles envoient des texto, parce qu’elles ne viennent pas à table à temps et parce qu’elles demandent l’heure d’une manière séductrice[255]. Par ailleurs, les organisations de femmes dénoncent les médias turcs qui, majoritairement, justifient ces incidents pour les mettre en « Une », au point que certains programmes de divertissement à la télévision tournent en dérision des scènes d’agression, de crime, de viol[256]. Ces actes sont banalisés dans un pays où les violences sexuelles sont courantes. Même s’il existe des lois pour lutter contre ce phénomène croissant, leur implémentation n’est pas réelle[257]. En 2010, il n’existait que 38 refuges pour femmes battues, pour la plupart animés par des bénévoles[258]. Aussi, en 2009, des organisations de femmes lançaient la “Platform of We Will Stop Femicide” dans le but de fournir des données et d’interpeler le gouvernement afin d’obtenir une réforme des politiques publiques[259].

Ces féminicides s’inscrivent dans l’histoire turque. En premier lieu, traditionnellement, en Turquie, les crimes d’honneur ou « coutumiers » visent à contrôler la vie sexuelle des femmes dans le sens le plus large[260]. Selon Arin Canan, avocate et co-fondatrice du Centre pour la mise en application des droits des femmes de l’Association du Barreau d’Istanbul, les jeunes femmes sont censées être vierges au mariage ; elles doivent être propres. Cette propreté est fragile et peut être détruite par de moindres actes, tels que se promener seule en ville, demander la diffusion d’une chanson d’amour à la radio, ou flirter avec un garçon. Le meurtre au nom de l’honneur est le coût à payer par les jeunes femmes pour acquérir la liberté et l’amour[261]. En vertu de ce système traditionnel, les femmes sont considérées comme la propriété de la famille et sont autant de symboles de la réputation ou de l’honneur de la famille. Si une jeune femme tombe amoureuse ou a une aventure, son prix de vente en tant que propriété chute, et toute la famille est réputée déshonorée au sein de la communauté. Ces croyances sont si puissantes que les familles sont prêtes à sacrifier la vie d’un de leurs membres féminins afin de rétablir leur honneur et de paraître droites aux yeux des autres.

En Turquie, comme dans les autres pays où les crimes d’honneur sont pratiqués, l’État est impliqué dans ces meurtres de femmes car la loi comme son application fournit une protection minimale pour les femmes quand elles sont vivantes et s’accommode des moyens par lesquels le meurtre est justifié après la mort des femmes. Souvent, ceux qui sont connus pour avoir participé à la décision de commettre le meurtre ne sont pas sanctionnés, et les membres de la famille sont rarement tenus à témoigner devant le tribunal[262]. Lorsque les victimes font des déclarations à la police ou aux procureurs, elles se rétractent souvent ou changent leurs déclarations lorsque le cas est jugé devant la cour. Les procureurs demandent ou mènent rarement des enquêtes plus approfondies et closent les affaires rapidement. Tout le monde, y compris le juge, sait ce qui s’est réellement passé et comment c’est arrivé, mais parce qu’ils vivent également dans la région, ils choisissent de ne pas poursuivre leur enquête[263].

En second lieu, les mariages précoces et les mariages forcés sont, dans ce pays, tolérés. Pourtant, en vertu du Code civil, l’âge légal du mariage est fixé à 17 ans pour les filles et les garçons, et en vertu du Code pénal les mariages religieux ne sont pas autorisés[264]. Toutefois, selon l’Institut turc de la statistique TurkStat, on compte plus de 181 000 épouses enfants en Turquie et le taux de consentement des parents aux mariages légaux avant 18 ans a augmenté de 94,2% en 2011[265]. À titre d’exemple, Arin Canan cite l’ancien Président de la République, Abdullah Gül, dont l’épouse avait 14 ans lors de leurs fiançailles et 15 ans lors du mariage. Elle établit le lien avec la religion musulmane qui autorise ces mariages, voire les incite au nom du respect du prophète Mahomet qui a épousé une fillette de sept ans. L’avocate insiste ainsi sur le lien entre ces deux types de mariages et les crimes d’honneur. Elle a observé de nombreux cas où les enfants forcées de se marier avant d’avoir atteint l’âge légal ont fini par être tuées, soit parce qu’elles s’étaient enfuies, déshonorant leurs familles, soit avaient été renvoyées chez leurs parents par leur mari non officiel qu’elles voulaient quitter après avoir subi des violences extrêmes.

Cette situation nationale discriminante demande à aller chercher des réponses au-delà de l’aspect traditionnel ou religieux de la question. Car, en dernier lieu, c’est surtout l’accélération du phénomène qui autorise d’autres hypothèses. La Turquie guette en effet depuis longtemps son entrée dans l’Union européenne. Aussi accepte-t-elle paradoxalement les injonctions des institutions internationales qui lui sont faites de légiférer en matière de droits des femmes. Selon un rapport des Nations Unies intitulé Progress of the World’s Women: In Pursuit of Justice”, paru en juillet 2011[266], ce pays lutte davantage que les États-Unis ou bien des pays européens en matière de violences à l’égard des femmes. Le 14 mars 2012, la Turquie devient le premier pays à ratifier la « Convention pour la prévention et la lutte contre les violences à l’égard des femmes et les violences domestiques » du Conseil de l’Europe[267]. Cette convention a pour ambition de prévenir les violences, de protéger les victimes et d’« en finir avec l’impunité des criminels ».

Aussi, au niveau international, le gouvernement turc tient à se montrer exemplaire en matière de droits des femmes. Mais au niveau national, la réalité est autre. Les lois existent mais s’appliquent difficilement. Par exemple, le droit à l’avortement jusqu’à dix semaines de grossesse a été voté en 1983[268]. Pourtant, il est aujourd’hui très difficile pour une femme d’obtenir une IVG car très peu de médecins la pratiquent[269]. La pression interne est importante et la rhétorique étatique contradictoire. Dans son discours de clôture de la Conférence Internationale des Parlementaires sur l’Application du Programme d’Action de la Conférence internationale pour la Population et le Développement qui s’est tenue les 24 et 25 mai 2012 à Istanbul, Recep Tayyip Erdoğan, alors Premier ministre, déclarait que « tout avortement est un nouvel Uludere », en référence au bombardement par les forces aériennes de l’armée turque le 28 décembre 2011 du village kurde du même nom, situé au Nord de l’Irak, qui avait fait 37 morts, pour la plupart des enfants[270]. En établissant cette comparaison, le Haut magistrat avait mis sur un pied d’égalité les impacts des attaques militaires perpétrées par l’État turc contre des populations kurdes en résistance et ceux du droit des femmes à disposer de leur corps. Plus tôt, lors de la Journée internationale des femmes de 2008, Erdoğan avait encouragé les femmes à donner naissance à au moins trois enfants « pour le bien de la Nation »[271].

Ce paradoxe permanent entre vote de lois pour les droits des femmes et réalité quotidienne délétère est le résultat de constructions sociales hiérarchisées anciennes et fortes, doublées d’une aliénation aux valeurs militaires de bien et de mal, de droit de vie et de mort sur les individus. Les féminicides et crimes d’honneur, en hausse, malgré la bonne image produite par le gouvernement au niveau international, restent des indicateurs non contestables d’un renforcement de la domination de la « classe des hommes » sur la « classe des femmes » dans la société turque.

L’élection de Tayyip Erdoğan à la tête de la Turquie symbolise un tournant rétrograde qui mise explicitement sur les inégalités femmes-hommes. Le recours à la banalisation des féminicides et plus généralement du sexisme, sert de base à un discours politique qui occulte les violences dont le pays est le théâtre (guerres, purge, terrorisme de genre) en contexte de mondialisation. La situation turque illustre un conflit permanent, par lequel les relations sociales entre les individus (femmes/hommes, musulmans/athées, pauvres/riches, pro/anti-Erdoğan, etc.) sont requalifiées au quotidien selon un processus qui les hiérarchise de façon accélérée.

La colonialité en prise avec ses bases militaristes

En France, le président associe délibérément sécurité nationale et taux de fécondité prétendument extravagant des femmes de l’ex-territoire colonial. De ce fait, il établit un lien structurel entre militarisation et histoire coloniale, sa façon de répondre lui-même, par corps des femmes interposés, aux nouveaux rapports de force, économiques et idéologiques, auxquels l’État qu’il dirige est confronté. En Afrique du Sud, les violences de genre, et en particulier les féminicides, participent du quotidien. Elles incarnent un héritage raciste, ségrégationniste et colonial, basé sur l’utilisation des armes par les dominants (ex-colons). Le lien entre colonialité et militarisation est ici entretenu par les auteurs des crimes, des hommes, aujourd’hui encore dominés, majoritairement noirs et pauvres. Ce lien est banalisé par les discours très sexualisés des dirigeants du pays qui appellent les hommes à plus de virilité et les femmes à l’union nationale plutôt qu’à la dénonciation des discriminations propres à leur classe. En Turquie, le nombre de féminicides ne cesse d’augmenter. Hérités de l’histoire du pays, ces crimes révèlent un virage rétrograde des populations qui, majoritairement, considèrent les femmes comme propriétés des hommes. Ici aussi, l’État, complice des crimes, continue à prendre à son compte la religion ou la tradition pour disqualifier les actes, tout en donnant des signes extérieurs de bonne conduite. Avec Erdoğan, se joue un paradoxe permanent entre modernité et populisme qui a pour résultat d’utiliser explicitement le corps des femmes comme arme de guerre. La sexualisation du corps des femmes, commune aux dirigeants des trois pays, n’est pas nouvelle mais s’accélère tout en empruntant des modèles militaires : démonstration de virilité, perpétuation de la Nation, répression des femmes en tant que menaces potentielles à l’ordre, y compris économique et idéologique, légitimation des répressions brutales et du crime par arme. La généralisation de la violence et le renforcement de la production de rapports sociaux inégalitaires, tous deux hérités de la période coloniale, accusent réception d’une colonialité aujourd’hui prise dans les fils de ses normes sécuritaires, produits de la militarisation.

Conclusion

Andrée Michel avait dès les années 1980 établi le lien entre militarisation et inégalités structurelles entre femmes et hommes dans le monde. Jules Falquet a démontré lors de la première décennie du IIIe millénaire que les impacts du SMI étaient désormais moins ostentatoires mais réels, quotidiens, brutaux, manifestés par des agressions ciblées des hommes sur les femmes. En comparant la France, l’Afrique du Sud et la Turquie, leurs contextes historiques et leurs actualités politiques mouvementées, nous avons établi le lien entre militarisation et colonialité : le SMI s’appuie désormais sur ses fondements – ordre, obéissance, hiérarchie, morale – pour mieux transformer et renforcer les rapports de domination de classe, de race, de sexe, inscrits dans la reproduction patriarcale d’une histoire coloniale, mondialisée, occidentalisée et capitaliste.

La militarisation est exprimée par une « course à la sécurité » généralisée qui n’est que la traduction d’un système ancien et rentable (économiquement et symboliquement), aujourd’hui perfectionné, de subalternisation des populations. On assiste à une double victimisation paradoxale : celle, archaïque, de la classe des femmes dans le but de mieux rendre invisibles ses stratégies de contournement de la violence et de la culture de guerre, et celle, attisée à l’extrême, de la classe des hommes, représentée comment ayant besoin de réapprendre ou de retrouver des valeurs portées par la militarisation : licité de l’acte de violence, expression de la virilité, utilisation de la force, droit de vie ou de mort sur autrui, détermination du bien et du mal. Cette deuxième victimisation vise la défense d’une classe d’agresseurs qui nie tout contexte historique, social, économique et politique. Elle traduit les attentes d’une classe dirigeante, majoritairement mâle, qui entre dans les jeux internes de concurrence accélérés (Occident/périphérie) par l’unique porte des rapports de force permanents.

La binarité – victimisation concomitante des femmes et des hommes –, héritée de l’histoire des conquêtes, accompagne la disqualification voulue nécessaire de la situation criminelle et délétère, produite par l’ensemble des tensions liées aux rapports de domination. Elle renforce la dépolitisation des violences sexuelles, xénophobes ou homophobes pour mieux engloutir, voire anéantir, la contestation. Elle entérine la légitimité de l’usage de la violence en tant que norme du côté des dominants (guerre contre les populations) alors qu’elle le condamne du côté des dominés (opposition/résistance aux actions illégitimes de l’État). Elle incarne la dialectique du « tout sécuritaire »/force/terreur qui impose à long terme l’assujettissement, voire la disparition, de l’être humain subalterne en tant que personne considérée non pensante, devenue inutile. Cette dialectique sous-entend en parallèle que les machines (IA) peuvent remplacer les personnes, au moins sur le plan militaire. Elle illustre une représentation du monde belliqueuse qui s’accompagne d’une stratégie de banalisation de l’élitisme, de l’hégémonie, de l’ordre, de la morale, de la hiérarchie, de l’autorité. Comme Hannah Arendt le soulignait en référence à une époque récente, cette stratégie illustre la « banalité du mal »[272].

Joelle Palmieri
Juin 2018

[1] Emilie Beauchesne, Permis de tuer ? Masculinité, culture d’agression et arméeLe cas du colonel Russel Williams, violeur en série et tueur, Saint-Joseph-du-Lac, M Editeur, 2018, 112 p.

[2] Les subalternes sont ceux, et en particulier, celles qui n’ont pas « socialement » la parole, dont la pensée n’est pas représentée et qui en viennent à gérer au pied levé ou par choix ce qui est globalement et socialement considéré comme périphérique, à savoir le quotidien. Il.elles se situent globalement hors du centre (Occident), dans ce qui est nommée la périphérie. Voir notamment Gayatri Chakravorty Spivak, Can the Subaltern Speak? (Les Subalternes peuvent-illes parler ?, 1988a, traduction française de Jérôme Vidal, Paris, Amsterdam, 2006), in Cary Nelson & Lawrence Grossberg (dir.), Marxism and the Interpretation of Culture, Chicago, University of Illinois Press, 738 p., p. 271-313.

[3] Armscor, organisme public sud-africain chargé des programmes d’armements installé à Paris, a des années 1970 au début des années 1990 acheté des armes à Matra, Aérospatiale, Thomson-CSF devenu Thalès, Snecma devenue Safran…, opérations connues des services français du renseignement. Hennie Van Vuuren, “Apartheid, Guns and Money: A tale of profit“, Pretoria, Jacana Media, 2017, 624 p.

[4] Michel Cabirol, « Armement : vers un nouveau succès majeur de la France à l’exportation (Turquie) », La Tribune, 18 juillet 2017, https://www.latribune.fr/entreprises-finance/industrie/aeronautique-defense/armement-vers-un-nouveau-succes-majeur-de-la-france-a-l-exportation-turquie-744313.html, consulté le 30 avril 2018.

[5] Andrée Michel, « Militarisation et politique du genre », Recherches féministes, Vol. 8, 1. 1995 : 15-34, p. 16.

[6] Jules Falquet, « Guerre de basse intensité contre les femmes? La violence domestique comme torture, réflexions sur la violence comme système à partir du cas salvadorien », Nouvelles Questions Féministes, Vol. 18, 3-4. 1997 : 129-160.

[7] Jules Falquet, « Ce que le genre fait à l’analyse de la mondialisation néolibérale : L’ombre portée des systèmes militaro-industriels sur les ”femmes globales” », Regards croisés sur l’économie n°15, “Peut-on faire l’économie du genre?”, 2014, pp. 341 et sq.

[8] Bilan social 2015 du ministère de la Défense, https://www.defense.gouv.fr/content/download/487432/7798345/version/1/file/Les+femmes+dans+larmee+francaise-diptyque.pdf, consulté le 30 mars 2018.

[9] Amberin Zaman, “Turkish Armed Forces seeks female fighters”, Al-Monitor, 18 décembre 2017, https://www.al-monitor.com/pulse/originals/2017/12/turkish-gendarmerie-recruits-women.html?utm_source=dlvr.it&utm_medium=twitter&utm_campaign=EBB%2012.19.2017&utm_term=Editorial%20-%20Military%20-%20Early%20Bird%20Brief, consulté le 30 mars 2018.

[10] Cheryl Hendricks, Transformation of Gender Relations in the South African National Defence Force: Real or Presumed?, Cape Town, Dakar, Nairobi and Oxford, Pambazuka Press, 2012.

[11] « Les vertus de la “Militarité“ », Le Fugace et le fulgurant, 18 mars 2013, http://www.le-fugace-et-le-fulgurant.fr/?p=722, consulté le 5 mars 2018.

[12] Marie-Anne Paveau, Le langage des militaires, thèse de doctorat, Paris, Université Paris IV, 1994.

[13] Emilie Beauchesne, Permis de tuer ?…, op. cit.

[14] Andrew J. Bacevich, The New American Militarism : How Americans are Seduced by War, Oxford University Press, New York, 2013 (2e édition), 278 p.

[15] John Kenneth Galbraith, La paix indésirable ? Rapport sur l’utilité des guerres, Paris, Calmann-Lévy, 1968.

[16] Jules Falquet, Préface : « Andrée Michel, une féministe anti-militariste dans le siècle », introduction au recueil de textes d’Andrée Michel, Féminisme et antimilitarisme, Paris, iXe, 2012.

[17] Ibid.

[18] Jules Falquet, Pax neoliberalia. Perspectives féministes sur (la réorganisation de) la violence, Paris, iXe Editions, novembre, 2016, 192 p.

[19] Elsa Dorlin, Se défendre : une philosophie de la violence, Paris, La Découverte, 2017.

[20] Andrée Michel, Agnès Bertrand et Monique Sene, « Le complexe militaro-industriel et les violences à l’égard des femmes », Nouvelles Questions Féministes, La militarisation et les violences à l’égard des femmes, No. 11/12, 1985, pp. 9-85.

[21] Andrée Michel, « Le complexe militaro-industriel, la guerre du Golfe et la démocratie en France », L’Homme et la société, N° 99-100, Femmes et sociétés, 1991, pp. 197-212.

[22] Andrée Michel, « Militarisation et politique du genre », op. cit., p. 17.

[23] Selon la théorie de la dépendance, les sociétés du Tiers-Monde (ou de la périphérie) dépendent structurellement des puissances capitalistes occidentales (le centre). Dans ses thèses du « système-monde », Immanuel Wallerstein différencie le centre de la périphérie en définissant une construction sociale et économique déséquilibrée, mobilisant des acteurs agissant à différents niveaux (nations, entreprises, familles, classes, groupes identitaires…), qui n’est pas figée dans le temps ni l’espace. Cet échange inégalitaire imposé par le centre assure l’auto-reproduction de la dépendance de la périphérie. Immanuel Wallerstein, Impenser la science sociale. Pour sortir du XIXe siècle, Paris, Puf, 1995, 320 p. (« Pratiques théoriques ») [1e éd., Unthinking Social Science. The limits of Nineteenth-Century Paradigms, Polity Press, 1991].

[24] Andrée Michel, Agnès Bertrand et Monique Sene, op. cit.

[25] Andrée Michel, « Militarisation et politique du genre », op. cit. , p. 17.

[26] Elle écrit « l’État français n’est que la pointe de l’iceberg d’un pouvoir invisible, le complexe militaro-industriel (CMI), une formation sociale, économique et politique qui s’est érigée en technostructure toute puissante au sein d’un appareil d’État qui en est arrivé à identifier les intérêts de la France avec ceux du CMI. » Andrée Michel, « Le complexe militaro-industriel, la guerre du Golfe et la démocratie en France », op. cit., p. 199.

[27] Andrée Michel, « Militarisation et politique du genre », op. cit. p. 18.

[28] Ibid., p. 19.

[29] Andrée Michel, « Le complexe militaro-industriel, la guerre du Golfe et la démocratie en France », op. cit., p. 200.

[30] Ibid., p. 199.

[31] Andrée Michel, « Militarisation et politique du genre », op. cit., p. 15.

[32] Scilla McLean, How nuclear weapons decisions are made, Londres, McMillan and the Oxford Research Group, 1986.

[33] Andrée Michel, « Le complexe militaro-industriel, la guerre du Golfe et la démocratie en France », op. cit., p. 207.

[34] Ibid., p. 209.

[35] La colonialité se définit comme l’ensemble des rapports de domination produits par la reproduction patriarcale de la mondialisation, du capitalisme et de l’occidentalisation, et antérieurement du colonialisme. Joelle Palmieri, « Afrique du Sud : le traditionalisme et le masculinisme au secours du pouvoir politique », contribution donnée lors du colloque « Penser le genre en contexte postcolonial » organisée par l’UMR Thalim/Ecritures de la Modernité – CNRS/Paris 3, les 20 et 21 novembre 2014, Paris, France.

[36] « L’eau potable en Guyane », Office de l’eau, 2016, http://eauguyane.fr/l-eau-en-guyane/eau-potable-et-assainissement/l-eau-potable-en-guyane, consulté le 5 mars 2018.

[37] « Stabilité du chômage en 2016 », INSEE, 23 mars 2017, https://www.insee.fr/fr/statistiques/2665551, consulté le 5 mars 2018.

[38] « L’état de l’école en Guyane : des progrès à poursuivre », INSEE, 16 décembre 2014, https://www.insee.fr/fr/statistiques/1285586#titre-bloc-14, consulté le 5 mars 2018.

[39] Eléa Pommiers, « Les chiffres-clés pour comprendre la situation en Guyane », Le Monde, 26 octobre 2017, http://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2017/03/27/les-chiffres-cles-pour-comprendre-la-situation-en-guyane_5101585_4355770.html, consulté le 5 mars 2018.

[40] Rapport de l’Institut national de la statistique et des études économiques, Insee, 2015, https://www.insee.fr/fr/statistiques/1908163, consulté le 5 mars 2018.

[41] C’est-à-dire le rapport entre le nombre d’infractions constatées et la population.

[42] Direction centrale de la police judiciaire – Délégation générale à l’outre-mer, 2008.

[43] AFP, « L’orpaillage a doublé en un an en Guyane », BFMTV, 28 janvier 2018, http://www.bfmtv.com/police-justice/l-orpaillage-a-double-en-un-an-en-guyane-1360576.html, consulté le 5 mars 2018.

[44] « Orpaillage illégal », WWF, 2014, https://www.wwf.fr/espaces-prioritaires/guyane/orpaillage-illegal, consulté le 5 mars 2018.

[45] 82 victimes déclarées pour 224 469 habitants recensés en 2011 (57 en Martinique et 64 en Guadeloupe pour le double d’habitants, et 126 à La Réunion pour quatre fois plus d’habitants). Pascale Vion, « Combattre toutes les violences faites aux femmes, des plus visibles aux plus insidieuses », CESE, 2014.

[46] Observatoire régional de la protection de l’enfance, 2015.

[47] Rapport d’activité du service de gynécologie-obstétrique du CHOG 2011.

[48] Les migrants viennent essentiellement de Haïti, du Brésil et du Surinam, voisins, et représentent 35% de la population totale.

[49] Maxime Bourdier, « À la pointe de la contestation en Guyane, « les 500 Frères », le collectif anti-délinquance controversé », HuffPost, 25 mars 2017, https://www.huffingtonpost.fr/2017/03/25/a-la-pointe-de-la-contestation-en-guyane-les-500-freres-le-c_a_22011320/, consulté le 5 mars 2018.

[50] « Guyane: qui sont les « 500 frères », ce collectif d’hommes cagoulés au cœur des manifestations? », BFMTV, 27 mars 2017, consulté le 5 mars 2018.

[51] Léa Stassinet, « Qui sont les 500 frères, symboles de la contestation en Guyane ? », RTL, 27 mars 2017, http://www.rtl.fr/actu/debats-societe/qui-sont-les-500-freres-symboles-de-la-contestation-en-guyane-7787839414, consulté le 5 mars 2018.

[52] « Guyane: au cœur de la contestation, qui sont les “500 frères» ?” », RFI, 4 avril 2017, http://www.rfi.fr/france/20170401-guyane-coeur-contestation-sont-500-freres, consulté le 5 mars 2018.

[53] « Guyane : qui sont les « 500 frères » au cœur de la contestation ? », Europe 1, 27 mars 2017, http://www.europe1.fr/societe/guyane-qui-sont-les-500-freres-au-coeur-de-la-contestation-3196799, consulté le 5 mars 2018.

[54] AFP, « Xénophobie en Afrique du Sud: le roi des Zoulous a joué avec le feu », Jeune Afrique, 22 avril 2015, http://www.jeuneafrique.com/depeches/229785/politique/xenophobie-en-afrique-du-sud-le-roi-des-zoulous-a-joue-avec-le-feu/, consulté le 5 mars 2018.

[55] Selon les statistiques nationales, l’Afrique du Sud comptait en 2016 1,6 millions d’immigrés (2,8% de la population) originaires pour la plupart d’Afrique australe, de la corne de l’Afrique et du sous-continent indien (Community Survey 2016, Statistical release P0301, Pretoria, Statistics South Africa, 2016, http://cs2016.statssa.gov.za/wp-content/uploads/2016/07/NT-30-06-2016-RELEASE-for-CS-2016-_Statistical-releas_1-July-2016.pdf, consulté le 19 avril 2018). Le FNUAP pour sa part estimait cette population pour l’année précédente à 3,14 millions, soit deux fois plus (International migrant stock 2015, Department of Economic and Social Affairs, 2015, http://www.un.org/en/development/desa/population/migration/data/estimates2/estimates15.shtml, consulté le 19 avril 2018). Selon Tom Moultrie, démographe et directeur du Centre for Actuarial Research (CARe) de l’Université du Cap, ces chiffres restent approximatifs au point qu’on ne peut pas estimer correctement ce nombre, sinon qu’il oscille entre un et trois millions (Tom Moultrie, “ANALYSIS: What do we really know about international migration to & from SA?”, AfricaCheck, 8 janvier 2017, https://africacheck.org/2017/01/08/analysis-really-know-international-migration-sa/?utm_source=English+media&utm_campaign=2b96e59ea2-EMAIL_CAMPAIGN_2017_01_13&utm_medium=email&utm_term=0_cd22d53740-2b96e59ea2-504547917, consulté le 19 avril 2018).

[56] Anthony Verdot-Belaval, « Et si le roi des Zoulous était derrière tout ça ? », Paris Match, 22 avril 2015, http://www.parismatch.com/Actu/International/Et-si-le-roi-des-Zoulous-etait-derriere-tout-ca-Goodwill-Zwelithini-xenophobie-afrique-du-sud-749954, consulté le 5 mars 2018.

[57] « Comprendre les violences xénophobes en Afrique du Sud », Le Monde, 19 avril 2015, http://www.lemonde.fr/afrique/article/2015/04/17/en-afrique-du-sud-les-etrangers-sont-accuses-de-tous-les-maux_4617874_3212.html, consulté le 5 mars 2018.

[58] « Afrique du Sud: après le roi zoulou, les propos racistes du fils Zuma », RFI Afrique, 2 avril 2015, http://www.rfi.fr/afrique/20150402-afrique-sud-propos-racistes-fils-president-zuma-roi-zoulou-kwazulu-natal-durban, consulté le 5 mars 2018.

[59] Martin Ewi, “South Africa must move beyond its organised crime clichés”, ISS Today, 15 août 2017, https://issafrica.org/iss-today/south-africa-must-move-beyond-its-organised-crime-cliches, consulté le 5 mars 2018.

[60] Amanda Khoza, “Zuma’s son wants foreigners out of the country”, News24, 1er avril 2015, https://www.news24.com/SouthAfrica/News/Zumas-son-wants-foreigners-out-of-the-country-20150331, consulté le 5 mars 2018.

[61] Ibid.

[62] Ibid.

[63] Ibid.

[64] Nous verrons infra comment le gouvernement tente depuis plusieurs années de légiférer sur les entreprises de sécurité et à quelles fins.

[65] AFP et Reuters, « Des violences xénophobes inquiètent l’Afrique du Sud », Le Monde, 17 avril 2015, http://www.lemonde.fr/afrique/article/2015/04/17/des-violences-xenophobes-inquietent-l-afrique-du-sud_4617868_3212.html, consulté le 5 mars 2018.

[66] Sébastien Hervieu, « Le pouvoir sud-africain sévit pour mettre fin à une vague de xénophobie », Le Monde, 20 avril 2015, http://www.lemonde.fr/international/article/2015/04/20/le-pouvoir-sud-africain-sevit-pour-mettre-fin-a-une-vague-de-xenophobie_4619110_3210.html, consulté le 5 mars 2018.

[67] Mike Brogden, La criminalité en Afrique du Sud, Au risque des espaces publics, Paris, Annales de la recherche urbaine, n° 83/84, 1999, p. 239 ; Michel De Coster, Bernadette Bawin-Legros & Marc Poncelet, Introduction à la sociologie, 6e édition, Broché, Paris, De Boeck, Collection Ouvertures Sociologiques, 2005, p. 119 ; Gary Kynoch, Urban violence in colonial Africa: A case for South African exceptionalism, contribution présentée au Wits Institute for Social and Economic Research, le 15 mai 2006, publiée dans Journal of Southern African Studies, XXXIV (3), septembre 2008, Londres, Routledge.

[68] Olivier Ribouis, « Afrique du Sud : Zuma justifie la xénophobie par l’apartheid et l’ignorance », La Nouvelle tribune, 22 avril 2015, https://lanouvelletribune.info/archives/international/afrique/23623-afrique-du-sud-zuma-justifie-la-xenophobie-par-l-apartheid-e-et-l-ignorance, consulté le 5 mars 2018.

[69] Jenna Etheridge, “State responsible for xenophobic violence – Malema“, News24, 16 avril 2015, https://www.news24.com/SouthAfrica/News/State-responsible-for-xenophobic-violence-Malema-20150416, consulté le 5 mars 2018.

[70] Ibid.

[71] Sébastien Hervieu, op. cit.

[72] « Afrique du Sud. Xénophobie : Mandela réveille-toi, ton peuple devient fou ! », Courrier International, 17 avril 2015, https://www.courrierinternational.com/article/afrique-du-sud-xenophobie-mandela-reveille-toi-ton-peuple-devient-fou, consulté le 5 mars 2018.

[73] Ibid.

[74] Zimeye, “Zimbabweans In Fear as S. Africa Police Launch Operation Fiela 2“, The Zimbabwean, 25 janvier 2018, http://www.thezimbabwean.co/2018/01/zimbabweans-in-fear-as-s-africa-police-launch-operation-fiela-2/, consulté le 5 mars 2018.

[75] “South Africa is the second worst country in the world for gun deaths”, BusinessTech, 22 juin 2015, https://businesstech.co.za/news/government/91284/south-africa-is-the-second-worst-country-for-gun-deaths-in-the-world/, consulté le 28 février 2018.

[76] International Homicides per 100,000 people, The World Bank: Data, UN Office on Drugs and Crime’s International Homicide Statistics database, 2017, <https://data.worldbank.org/indicator/VC.IHR.PSRC.P5&gt;, consulté le 7 octobre 2017.

[77] Mark Shaw et Peter Gastrow, “Stealing the Show? Crime and Its Impact in Post-Apartheid South Africa”, Daedalus, Vol. 130, No. 1. Winter, 2001, p. 237 ; Guy Lamb, “Under the Gun: An Assessment of Firearm Crime and Violence in South Africa”, Report compiled for the Office of the President, Pretoria, Mail and Guardian (South Africa), 2008; Kwanele Sosibo, “Who Was Andries Tatane?”, Mail and Guardian, 21 avril 2011, https://mg.co.za/article/2011-04-21-who-was-andries-tatane, consulté le 15 mars 2018 ; Patrick Burton et al., National Victims of Crime Survey: South Africa 2003, Pretoria, Institute for Security Studies, 2004, p.22, http://www.iss.co.za/pubs/monographs/no101/contents.html, consulté le 28 février 2018.

[78] Rebecca Davis, “National Firearms Summit: The battle over SA’s guns rages on”, Daily Maverick, 24 mars 2015, https://www.dailymaverick.co.za/article/2015-03-24-national-firearms-summit-the-battle-over-sas-guns-rages-on/#.WpaOhOmo1vw, consulté le 28 février 2018.

[79] Yolanda Mitchell (dir.), The Hate & Bias Crimes Monitoring – Form Project – January 2013 – September 2017, Hcwg Research Sub-Committee, 6 décembre 2017, http://hcwg.org.za/wp-content/uploads/2018/02/Report-Hate-Bias-Crimes-Monitoring-Form-Project-SCREEN.pdf, consulté le 28 février 2018.

[80] Ibid.

[81] Ibid.

[82] John Daniel, Adam Habit & Roger Southall, State of the nation: South Africa, 2003-2004, Human Sciences Research Council. Democracy and Governance Research Programme, Le Cap, HSRC Press, 2003, 416 p. ; Harron Bhorat, Carlene Van Der Westhuizen & Toughedah Jacobs, “Income and Non-Income Inequality in Post-Apartheid South Africa: What are the Drivers and Possible Policy Interventions?”, document de travail pour la Development Policy Research Unit (DPRU), 09/138 août 2009, DPRU, p. 8 ; Sakhela Buhlungu & alii (dir.), The State of the Nation: South Africa 2005-2006, Human Sciences Research Council’s (HSRC), 2005-06, 568 p. ; Zarina Maharaj, “Gender Inequality and the Economy: Empowering Women in the new South Africa”, intervention lors de la rencontre de la Professional Women’s League of KwaZuluNatal, 9 août 1999, Women in the South African Labour Market 1995-­2005, document de travail pour la DPRU, 07/118, 2007, 53 p., p. 1-50.

[83] Joelle Palmieri, « Le masculinisme d’État en renfort du patriarcat », Revue Passerelle N° 17 « Féminismes ! Maillons forts du changement social », Ritimo, juin 2017, p. 155-161.

[84] Les gouvernements qui se sont succédés depuis la fin de l’apartheid en Afrique du Sud ont choisi de mettre en place des politiques néolibérales dans le sens où elles sont basées sur une économie et une idéologie qui valorisent les libertés économiques (libre-échange, liberté d’entreprendre, libre choix de consommation, de travail, etc.), la libre concurrence entre les entreprises privées au détriment de l’intervention de l’État, et la globalisation des échanges de services, de biens et des facteurs de production correspondants (capital, travail, connaissance…) qui forment des marchés mondiaux.

[85] “South African police break up anti-immigrant protests”, Reuters, 24 février 2017, https://www.reuters.com/article/us-safrica-xenophobia/south-african-police-break-up-anti-immigrant-protests-idUSKBN1631D9, consulté le 7 mars 2018

[86] Matuma Letsoalo & Sarah Evans, “Ramaphosa must answer for ‘premeditated’ Marikana killings”, Mail and Guardian, 18 décembre 2013, https://mg.co.za/article/2013-12-18-capitalist-ramaphosa-must-answer-for-premeditated-marikana-killings, consulté le 20 février 2018.

[87] Joelle Palmieri, TIC, colonialité, patriarcat: Société mondialisée, occidentalisée, excessive, accélérée… quels impacts sur la pensée féministe? Pistes africaines, Yaoundé, Editions Langaa, 2016, 296 p., p. 175.

[88] « Le président turc Recep Tayyip Erdoğan apparaît via Facetime à la télévision, en plein coup d’État », HuffPost, 15 juillet 2016, https://www.huffingtonpost.fr/2016/07/15/Erdoğan-facetime-coup-detat-turquie_n_11021622.html, consulté le 7 mars 2018.

[89] « Manifestation en soutien au président turc Erdoğan dans les rues de Cologne », Le Monde, 31 juillet 2016, http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2016/07/31/manifestation-en-soutien-au-president-turc-Erdoğan-dans-les-rues-de-cologne_4976799_3218.html, consulté le 7 mars 2018.

[90] « Turquie : le président Erdoğan instaure l’état d’urgence pour trois mois, Le Monde, 20 juillet 2016, http://www.lemonde.fr/europe/article/2016/07/20/la-derive-autoritaire-se-poursuit-apres-le-putsch-rate-en-turquie_4972405_3214.html, consulté le 7 mars 2018.

[91] « Turquie : le président Erdoğan veut renforcer son emprise sur l’armée et le renseignement », Le Monde, 31 juillet 2016, http://www.lemonde.fr/europe/article/2016/07/31/turquie-le-president-Erdoğan-veut-renforcer-son-emprise-sur-l-armee-et-le-renseignement_4976672_3214.html, consulté le 7 mars 2018.

[92] Anadolu Agency, “Leading Turkish businessmen held in Gülenist coup probe“, Daily Sabah, 29 juillet 2016, https://www.dailysabah.com/investigations/2016/07/29/leading-turkish-businessmen-held-in-gulenist-coup-probe, consulté le 9 avril 2018.

[93] « Turquie: armée vs PKK », ParsToday, 31 juillet 2016, http://parstoday.com/fr/news/middle_east-i7447-turquie_armée_vs_pkk, consulté le 9 avril 2018.

[94] « Turquie : le président Erdoğan veut renforcer son emprise sur l’armée et le renseignement », op. cit.

[95] « Aux armes citoyennEs ! Allumons le feu ! », Kedistan, 28 décembre 2017, http://www.kedistan.net/2017/12/26/aux-armes-citoyennes-allumons-le-feu/, consulté le 26 février 2018.

[96] Ibid.

[97] Ibid.

[98] « Turquie : qui est Fethullah Gülen, accusé par le pouvoir d’avoir initié le coup d’Etat ? », Le Monde, 16 juillet 2016, http://www.lemonde.fr/international/article/2016/07/16/turquie-qui-est-fetullah-gulen-accuse-par-le-pouvoir-d-avoir-initie-le-coup-d-etat_4970450_3210.html, consulté le 7 mars 2018.

[99] Laureline Duvillard, « Sur les traces de la révolte initiée au parc Gezi », 24 heures, 5 juin 2013, https://www.24heures.ch/monde/retour-revolte-eclos-ombre-arbres/story/25505001, consulté le 7 mars 2018.

[100] Essayan Zabel, Dans les ruines – Les massacres d’Adana, avril 1909, traduit par Leon Ketcheyan, Libretto, 336 p., 2015 [1re édition en arménien 1911].

[101] Nichanian Mikaël, Détruire les Arméniens. Histoire d’un génocide, Paris, Presses Universitaires de France, 280 p., 2015.

[102] Taner Akçam, Un acte honteux. Le génocide arménien et la question de la responsabilité turque, Paris, Denoël, 2008.

[103] Levent Ünsaldi, « Du rôle politique de l’armée en Turquie », Revue Tiers Monde 2008/2 (n° 194), Paris, Armand Collin, 2008, 224 p., pp. 261 – 279.

[104] Ibid.

[105] Hamit Bozarslan, « II. L’État kémaliste : de l’abolition du sultanat au pluralisme politique (1922-1950) », Histoire de la Turquie contemporaine, Paris, La Découverte, 2016 (3e éd.), 128 p., pp. 27-49.

[106] « L’armée turque, l’une des forces les mieux entraînées au monde », Le Parisien, 16 juillet 2016, http://www.leparisien.fr/flash-actualite-monde/l-armee-turque-l-une-des-forces-les-mieux-entrainees-au-monde-16-07-2016-5972557.php, consulté le 7 mars 2018.

[107] Mireille Sadège, La France et la Turquie dans l’Alliance atlantique, CVMag, 2005, 314 p.

[108] Mikhail Gamandiy-Egorov, « La Turquie poursuit son éloignement de l’Otan », Sputnik France, 7 février 2018, https://fr.sputniknews.com/points_de_vue/201802071035060205-turquie-otan/, consulté le 7 mars 2018.

[109] « La famille Erdoğan éclaboussée par le pétrole de Daech », Sputnik France, 26 novembre 2015, https://fr.sputniknews.com/presse/201511261019838757-Erdoğan-daech-petrole-ei/, consulté le 7 mars 2018.

[110] Ibid.

[111] Ariane Bonzon, « Le mariage de la fille d’Erdoğan, symbole d’une stratégie militaire », Slate, 18 mai 2016, http://www.slate.fr/story/118237/mariage-sumeyye-Erdoğan-strategie-militaire, consulté le 27 février 2018.

[112] Nicolas Cheviron, Jean-François Pérouse, Erdoğan, nouveau Père de la Turquie ?, Éditions François Bourin, 2016.

[113] Ariane Bonzon, op.cit.

[114] Ibid.

[115] Ibid.

[116] Marie Jégo, « En Turquie, Erdoğan est le chef de l’entreprise de défense », Le Monde, 23 février 2018, http://www.lemonde.fr/economie/article/2018/02/23/en-turquie-Erdoğan-est-le-chef-de-l-entreprise-de-defense_5261437_3234.html, consulté le 27 février 2018.

[117] Ariane Bonzon, op.cit.

[118] Marie Jégo et Benjamin Barthe, « Doha-Riyad-Ankara : un axe sunnite au secours des rebelles de Syrie », Le Monde, 12 mai 2015, http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2015/05/12/doha-riyad-ankara-un-axe-sunnite-au-secours-des-rebelles-de-syrie_4631759_3218.html#bUqCOAeoDDgtzarH.99, consulté le 27 février 2018.

[119] Ariane Bonzon, op.cit.

[120] Hannah Arendt, « Sur la violence », Du mensonge à la violence, Essais de politique contemporaine, traduction française, Paris, Calmann-Lévy, p. 105-208 [on violence, édition originale en anglais 1970], 1972.

[121] Ibid.

[122] Nicole-Claude Mathieu, L’arraisonnement des femmes. Essais en anthropologie des sexes, Paris, Éditions de l’EHESS, « Cahiers de l’Homme » n°24, 1985, 251 p., p. 172.

[123] Geneviève Fraisse, Du consentement, Paris, Le Seuil, 2007, 160 p.

[124] “Global Defence Spending to Hit Post-Cold War High in 2018, Jane’s by IHS Markit Says”, Jane’s 360, 18 décembre 2017, http://www.janes.com/article/76463/global-defence-spending-to-hit-post-cold-war-high-in-2018-jane-s-by-ihs-markit-says, consulté le 8 mars 2017.

[125] Global Firepower 2017, https://www.globalfirepower.com/countries-listing.asp, consulté le 5 mars 2017.

[126] 50 facteurs sont pris en compte pour établir le classement : situation géographique, exploitation des ressources naturelles, quantité d’arsenal ou encore la situation économique. Certaines données ne sont pas intégrées comme les capacités nucléaires et la direction politique et militaire.

[127] Jean-Marie Collin, Michel Drain, Bernard Norlain, Paul Quiles, Les neuf puissances nucléaires, Irénées, 2015.

[128] Sénat – Session extraordinaire de 2016-2017 – proposition de loi visant à renforcer le contrôle sur le commerce des armes et relative à la violation des embargos, 31 juillet 2017, https://www.senat.fr/leg/ppl16-695.html, consulté le 5 mars 2017.

[129] “Global Defence Spending to Hit Post-Cold War High in 2018, Jane’s by IHS Markit Says”, op. cit.

[130] « Le plan du gouvernement pour économiser 4,5 milliards d’euros », Propos recueillis par Matthieu Pelloli, Le Parisien, 10 juillet 2017, http://www.leparisien.fr/economie/le-plan-du-gouvernement-pour-economiser-4-5-milliards-d-euros-10-07-2017-7124781.php, consulté le 8 mars 2017.

[131] Projet de loi de finances pour 2017, renvoyé à la Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, présenté au nom de M. Manuel Valls Premier ministre par M. Michel Sapin ministre de l’Économie et des FINANCES, et par M. Christian Eckert Secrétaire d’État chargé du Budget et des comptes publics, Assemblée nationale, Constitution du 4 octobre 1958 Quatorzième législature, Enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale le 28 septembre 2016, N° 4061.

[132] Rapport annuel sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans la fonction publique, édition 2015, ministère de la Fonction Publique, https://www.fonction-publique.gouv.fr/files/files/publications/rapport_annuel/RA-egalite-2015.pdf, consulté le 28 février 2018.

[133] Source : Projet de loi de finances pour 2017

[134] Source : Le Parisien, 10 juillet 2017

[135] « Projet de Loi de programmation militaire 2019-2025 : “Une LPM de renouveau“ », DICoD, 09/02/2018, https://www.defense.gouv.fr/actualites/articles/projet-de-loi-de-programmation-militaire-2019-2025-une-lpm-de-renouveau, consulté le 5 mars 2018.

[136] Laurent Touchard, « L’évolution des forces armées sud-africaines », Défense & Sécurité internationale, no 133,‎ janvier-février 2018.

[137] Ibid.

[138] Ibid.

[139][139][139] “2018 Budget highlights”, Trésorerie Nationale, 2018, https://www.pwc.co.za/en/assets/pdf/budget-2018-highlights.pdf, consulté le 9 mars 2018.

[140] “Budget Review 2017”, National Treasury Republic of South Africa, 22 February 2017, http://www.treasury.gov.za/documents/national%20budget/2017/review/FullBR.pdf, consulté le 9 mars 2018.

[141] Le taux de chômage des femmes atteint 46,6% contre 31,4% pour les hommes, toutes races confondues. Désagrégés par race, les chiffres du chômage atteignent 53% pour les Noires contre 36,7% pour les Noirs. Carlene Van Der Westhuizen, Sumayya Goga & Morné Oosthuizen, Women in the South African Labour Market 1995-­2005, document de travail pour la DPRU, 07/118, 2007, 53 p., p. 23.

[142] Sophie Lefeez, « L’industrie de défense turque : un modèle de développement basé sur une volonté d’autonomie stratégique », Iris, avril 2017.

[143] Chiffres du sous-secrétariat d’État à l’Industrie de défense (Savunma Sanayii Müsteşarlığı, SSM), « Turkey Aerospace & Defense », Global Business Report, 2016, http://gbreports.com/wp-content/uploads/2016/03/Turkey-Aerospace-2016-Online-Version.pdf, consulté le 27 février 2018.

[144] Sous-secrétariat à l’Industrie de défense, Rapport d’activité, 2015, p.29.

[145] Sophie Lefeez, op. cit.

[146] « Turkish gov’t eyes to triple share of R&D activities in economy through a reform package », Hurriyet Daily News, 14 janvier 2016, http://www.hurriyetdailynews.com/turkish-govt-eyes-to-triple-share-of-rd-activities-in-economy-through-a-reform-package–93860, consulté le 27 février 2018.

[147] Sophie Lefeez, op. cit.

[148] Ibid.

[149] Ibid.

[150] Ibid.

[151] Ibid.

[152] « La situation économique en Turquie et le budget 2018 », CCI France Turquie, 19 février 2018, http://www.ccift.com/single-news/n/la-situation-economique-en-turquie-et-le-budget-2018/, consulté le 27 février 2018.

[153] “Turkish government’s war budget for 2018”, ANF News, 21 décembre 2017, https://anfenglish.com/news/turkish-government-s-war-budget-for-2018-23752, consulté le 9 mars 2018.

[154] Romain Vincent, « Les Saoudiens en appellent aux Turcs pour leur industrie de défense », FOB, 26 février 2018, http://forcesoperations.com/les-saoudiens-en-appellent-aux-turcs-pour-leur-industrie-de-defense/, consulté le 27 février 2018.

[155] Ibid.

[156] Dan Israël et Manuel Jardinaud, « L’Assemblée découvre le code du travail version Macron », Médiapart, 5 juillet 2017, https://www.mediapart.fr/journal/france/050717/lassemblee-decouvre-le-code-du-travail-version-macron?onglet=full, consulté le 9 mars 2018.

[157] Projet de loi d’habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social, Ministère du travail, République Française, 21 juin 2017. https://assets.documentcloud.org/documents/3879615/Projet-De-Loi-D-Habilitation-Pour-Le.pdf, consulté le 7 juillet 2017.

[158] « Réforme du code du travail : les temps forts de la première semaine de débat à l’Assemblée », Le Monde, 14 juillet 2017, http://www.lemonde.fr/politique/article/2017/07/14/reforme-du-code-du-travail-les-temps-forts-de-la-premiere-semaine-de-debat-a-l-assemblee_5160602_823448.html, consulté le 1er mars 2018.

[159] CGT, Premier rendez-vous sur la loi travail XXL, Les salariés ont de quoi se mobiliser !, 13 juin 2017, http://cgt.fr/Les-salaries-ont-de-quoi-se.html, consulté le 7 juillet 2017.

[160] Le 7 juillet 2017, Marlene Schiappa, Secrétaire d’État chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes, retweet une des données statistiques du Haut Conseil à l’égalité publiée en 2011 titrée « 73% des travailleur.se.s pauvres sont des femmes », http://www.haut-conseil-egalite.gouv.fr/stereotypes-et-roles-sociaux/reperes-statistiques/, consulté le 7 juillet 2017. Source : Enquête Revenus fiscaux et sociaux 2011, Insee-DGFiP-Cnaf-Cnav-CCMSA in Chiffres Clés 2014, Vers l’égalité réelle entre les femmes et les hommes. Thème 2, p. 7 et Enquête Revenus fiscaux et sociaux 2008, Insee-DGFiP-Cnaf-Cnav-CCMSA, Chiffres Clés 2010, l’égalité entre les femmes et les hommes in Chiffres Clés 2010, l’égalité entre les femmes et les hommes, tab. 75, 76 p. 83-85.

[161] Paul Cassia, « Conformité à la Constitution des assignations à résidence hors état d’urgence », Médiapart, 20 février 2018, https://blogs.mediapart.fr/paul-cassia/blog/200218/conformite-la-constitution-des-assignations-residence-hors-etat-d-urgence, consulté le 1er mars 2018.

[162] Jean-Loup Adenor, « Fin de l’état d’urgence. Les 4 mesures qui ne disparaissent pas », Ouest France, la 31 octobre 2017, https://www.ouest-france.fr/terrorisme/fin-de-l-etat-d-urgence-les-4-mesures-qui-ne-disparaitront-pas-5349720, consulté le 1er mars 2018.

[163] Patrice Bouveret, « ONU : 122 États adoptent un traité d’interdiction des armes nucléaires », L’observatoire des armements, 7 juillet 2017, http://www.obsarm.org/spip.php?article294, consulté le 21 mars 2018.

[164] Communiqué d’ICAN France – Les négociations viennent de s’achever aux Nations Unies ce 7 juillet 2017; un nouveau traité de désarmement multilatéral sera ouvert à la signature en septembre. http://icanfrance.org/traite-interdisant-armes-nucleaires-adopte/, consulté le 8 juillet 2017.

[165] « Un Traité d’interdiction des armes nucléaires a été adopté », GRIP, 14 Juillet 2017, http://www.grip.org/fr/node/2381, consulté le 21 mars 2018.

[166] Georgi Gotev, « Des eurodéputés dénoncent la militarisation de l’aide au développement », Euractiv, 5 juillet 2017, https://www.euractiv.fr/section/aide-au-developpement/news/meps-denounce-attempts-to-militarise-eus-development-policy/, consulté le 21 mars 2018.

[167] La commission développement du Parlement européen s’est réunie le 3 juillet 2017 et a exprimé son souhait de séparer l’aide au développement des enjeux sécuritaires. Source : Ibid.

[168] « Macron promet un engagement militaire au Mali jusqu’à éradication des terroristes islamistes », France 24, 19 mai 2017, http://www.france24.com/fr/20170519-mali-emmanuel-macron-visite-ibrahim-boubacar-keita-terrorisme-barkhane, consulté le 8 juillet 2017.

[169] Rapport d’information de MM. Jean-Pierre Raffarin et Daniel Reiner, fait au nom de la Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, n° 562 (2016-2017) – 24 mai 2017. http://www.senat.fr/notice-rapport/2016/r16-562-notice.html, consulté le 8 juillet 2017.

[170] En juin 2017, l’Elysée crée le Centre national de contre-terrorisme (CNCT) et transforme le Président de la République en coordinateur du renseignement, en plus d’être constitutionnellement chef des Armées. « Emmanuel Macron se nomme chef des services secrets », Journal du dimanche, 11 juin 2017, http://www.lejdd.fr/politique/emmanuel-macron-se-nomme-chef-des-services-secrets-3357200#xtor=CS1-3, consulté le 1er mars 2018.

[171] Laurent Valdiguie, « Emmanuel Macron se nomme chef des services secrets », Journal du dimanche, 11 juin 2017, http://www.lejdd.fr/politique/emmanuel-macron-se-nomme-chef-des-services-secrets-3357200, consulté le 8 juillet 2017.

[172] Éléments de langage utilisés par la ministre pendant les débats de la commission parlementaire.

[173] Projet de loi
d’habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social, 27 juin 2017, http://www.assemblee-nationale.fr/15/projets/pl0004-ei.asp, consulté le 12 mars 2018.

[174] « 14-Juillet: rendre aux armées leur vraie place », The Conversation, 12 juillet 2017, http://theconversation.com/rendre-aux-armees-leur-vraie-place-80840, consulté le 1er mars 2018.

[175] PSIRA Annual report 2016, http://www.psira.co.za/psira/images/Documents/Publications/Annual_Reports/PSIRAAnnualReport2015-16.pdf, consulté le 14 mars 2018.

[176] Nicolas Florquin (dir.), “A Booming Business – Private Security And Small Arms”, Small Arms Survey 2011, pp. 100-132, http://www.smallarmssurvey.org/fileadmin/docs/A-Yearbook/2011/en/Small-Arms-Survey-2011-Chapter-04-EN.pdf, consulté le 14 mars 2018.

[177] PSIRA Annual report, op. cit.

[178] “Victims of Crime Survey 2016/17”, Statistics South Africa, 28 septembre 2017, http://www.statssa.gov.za/?p=10521, consulté le 14 mars 2018.

[179] Ibid.

[180] Ibid.

[181] “South Africa’s R40bn private security industry under threat“, Daily Maverick, 14 mai 2017, https://www.dailymaverick.co.za/article/2017-05-14-south-africas-r40bn-private-security-industry-under-threat/#.WqqnKumo1vx, consulté le 14 mars 2018.

[182] Ibid.

[183] Ibid.

[184] PSIRA Annual report, op. cit.

[185] Semo Marc, « Turquie : “Erdoğan veut une armée à sa botte“ », Le Monde, entretien avec Gareth Jenkins, 14.7.17, http://www.lemonde.fr/international/article/2017/07/14/turquie-Erdoğan-veut-une-armee-a-sa-botte_5160471_3210.html, consulté le 26 février 2018.

[186] Ibid.

[187] Ibid.

[188] AFP, « Turquie : Erdoğan arrache de justesse un oui à la réforme de la Constitution », Le Monde, 16.4.17, http://www.lemonde.fr/international/article/2017/04/16/le-premier-ministre-turc-proclame-la-victoire-du-oui-au-referendum-constitutionnel_5112199_3210.html#HzIeuvYP3vhtgKGD.99, consulté le 26 février 2018.

[189] Ibid.

[190] Ibid.

[191] Naz Oke, « Turquie • Retour du port de l’uniforme dans les prisons », Kedistan, 6.8.17, http://www.kedistan.net/2017/08/06/turquie-obligation-de-vetement-unique-prisons/, consulté le 26 février 2018.

[192] Ibid.

[193] RFI, « La Turquie remplace les chefs de ses trois armées », 12 août 2017, http://www.rfi.fr/europe/20170802-turquie-remplace-chefs-trois-armees-Erdoğan?ref=tw_i, consulté le 26 février 2018.

[194] Pinar Selek, Service militaire en Turquie et construction de la classe de sexe dominante, Devenir homme en rampant, Paris, L’Harmattan, 2014, 220 p.

[195] Remy Demichelis, « Faut-il interdire les robots tueurs ? », Les Echos, 11 avril 2018, https://www.lesechos.fr/intelligence-artificielle/veille-technologique/0301549913404-armes-autonomes-vers-une-reglementation-2168368.php, consulté le 20 avril 2018.

[196] Kate Millett, Sexual Politics, Londres, Granada Publishing, 1969, 528 p.

[197] Jules Falquet, Pax Neoliberalia, op. cit.

[198] Ibid.

[199] Ibid.

[200] Joelle Palmieri, TIC, colonialité, patriarcat: Société mondialisée, occidentalisée, excessive, accélérée… quels impacts sur la pensée féministe ? Pistes africaines, op. cit., p. 43.

[201] Nicole-Claude Mathieu, L’arraisonnement des femmes…, op. cit.

[202] « Ces vérités de Macron sur l’Afrique qui dérangent : Afrikipresse de retour du G20 à Hambourg », Afrikipresse, 9 juillet 2017, http://www.afrikipresse.fr/international/ces-verites-de-macron-sur-l-afrique-qui-derangent-afrikipresse-de-retour-du-g20-a-hambourg, consulté le 13 mars 2018.

[203] « Macron et le ventre des femmes africaines, une idéologie misogyne et paternaliste », entretien réalisé avec Françoise Vergès par Rosa Moussaoui, L’Humanité, 17 juillet 2017, https://www.humanite.fr/macron-et-le-ventre-des-femmes-africaines-une-ideologie-misogyne-et-paternaliste-638920, consulté le 13 mars 2018.

[204] Nicolas Sersiron et Anouk Renaud, « Qui est responsable du sous-développement de l’Afrique : les femmes africaines ou le G20 ? », Politis, 13 juillet 2017, https://www.politis.fr/articles/2017/07/qui-est-responsable-du-sous-developpement-de-lafrique-les-femmes-africaines-ou-le-g20-37346/, consulté le 13 mars 2018.

[205] Balla Fofana, « M. Macron, laissez tranquille le ventre des Africaines », Libération, 11 juillet 2017, http://www.liberation.fr/planete/2017/07/11/m-macron-laissez-tranquille-le-ventre-des-africaines_1583222, consulté le 13 mars 2018.

[206] Page Facebook de Françoise Vergès, du 11 juillet 2017, https://www.facebook.com/francoise.verges/posts/1378373525543730, consulté le 28 février 2018.

[207] Ibid.

[208] Banque mondiale – Taux de fertilité, total (naissances par femme), Division des Nations Unies pour la population. 2009. World Population Prospects: The 2008 Revision (Perspectives relatives à la population mondiale : révision de 2008). New York, Nations Unies, Département des affaires économiques et sociales. http://donnees.banquemondiale.org/indicateur/SP.DYN.TFRT.IN?view=map&year_high_desc=true, consulté le 13 mars 2018.

[209] Anouk Renaud et Nicolas Sersiron, « Qui est responsable du sous-développement de l’Afrique : les femmes africaines ou le G20 ? », CADTM, 14 juillet 2017, http://www.cadtm.org/spip.php?page=imprimer&id_article=15027, consulté le 13 mars 2018.

[210] Gu Xuewu, « China Returns to Africa, Trends East Asia (TEA) », Studies n° 9, février 2005.

[211] René Otayek (dir.) « Religion et globalisation : l’islam subsaharien à la conquête de nouveaux territoires », La revue internationale et stratégique, LII, hiver 2003-2004, p. 51-65.

[212] Joelle Palmieri, TIC, colonialité, patriarcat: Société mondialisée, occidentalisée, excessive, accélérée… quels impacts sur la pensée féministe ? Pistes africaines, op. cit. p. 44.

[213] Aminata Diaw, « Nouveaux contours de l’espace public en Afrique », Diogène, 2/2004 (n° 206), p. 37-46.

[214] Ibid.

[215] Page Facebook de Françoise Vergès, du 11 juillet 2017, https://www.facebook.com/francoise.verges/posts/1378373525543730, consulté le 28 février 2018.

[216] Ibid.

[217] Gayatri Chakravorty Spivak, op. cit.

[218] Gayatri Chakravorty Spivak, In Other Worlds: Essays in Cultural Politics, New York, Routledge, 1988b, 336 p.

[219] Joelle Palmieri, TIC, colonialité, patriarcat: Société mondialisée, occidentalisée, excessive, accélérée… quels impacts sur la pensée féministe ? Pistes africaines, op. cit., p. 186.

[220] Rosana Norman, Richard Matzopoulos, Pam Groenewald et Debbie Bradshaw, “The High Burden of Injuries in South Africa”, Bull World Health Organization, n° 86, 2007/9, pp. 695-702.

[221] Mike Brogden, « La Criminalité en Afrique du Sud, au risque des espaces publics », Paris, Annales de la recherche urbaine, n° 83/84, 1999, p. 239.

[222] Gary Kynoch, “Urban Violence in Colonial Africa: A Case for South African Exceptionalism”, contribution présentée au Wits Institute for Social and Economic Research, le 15 mai 2006, publiée dans Journal of Southern African Studies, XXXIV (3), septembre 2008, Londres, Routledge.

[223] Michel De Coster, Bernadette Bawin-Legros et Marc Poncelet, Introduction à la sociologie, Broché, Paris, De Boeck, Collection Ouvertures Sociologiques, 2005, p. 119. [6e édition]

[224] Gary Kynoch, “Urban Violence in Colonial Africa…”, op. cit.

[225] The militarization of the apartheid state, Committee on South African War Resistance, 1982, 22 p.

[226] Crime Situation In RSA, Nine months of 2016/2017: 1 April 2016 – 31 December 2016, <https://www.saps.gov.za/services/mono_9_months_crime_situation_march_2017.pdf&gt;, consulté le 27 octobre 2017.

[227] Rachel Jewkes et alii, “Understanding Men’s Health and Use of Violence: Interface of Rape and HIV in South Africa”, Gender & Health Research Unit, Medical Research Council, 2009.

[228] CIET Africa 2004, Sexual violence & HIV/AIDS: Executive report on the 2002 nationwide youth Survey, Johannesbourg, CIET, p. 4.

[229] Gavin Silber et Nathan Geffen, Race, class and violent crime in South Africa: Dispelling the ‘Huntley thesis, Le Cap, Institute for Security Studies, décembre 2009, p. 36.

[230] Ibid. p. 2.

[231] Cape Town Rape Crisis centre, <https://web.archive.org/web/20001002065959/http://www.rapecrisis.org.za/statistics.htm&gt;, consulté le 27 octobre 2017.

[232] Jewkes et alii, Understanding Men’s Health…, op. cit., p. 5.

[233] Le terme « féminicide » est inspiré du terme « sexocide » et le précise. Dans son ouvrage Le sexocide des sorcières, l’écrivaine française Françoise d’Eaubonne fait référence à la vague d’assassinats systématiques des sorcières puis des femmes pendant deux siècles en France, celui de la Renaissance et de l’âge classique. Par cette immersion dans la chasse aux sorcières à l’initiative des catholiques, elle crée le concept de « phallo logos » qui qualifie, à partir du phantasme de l’absence de l’« autre », d’un univers qui serait le même, uniforme – la culture du Dieu « Logos », « raison » en grec – le rêve de voir les femmes disparaître, tout en acceptant qu’elles existent : D’Eaubonne Françoise, Le Sexocide des sorcières, Paris, Esprit Frappeur, 1999. Le terme « féminicide » qualifie donc tout acte qui tente d’éliminer les femmes. Il a particulièrement été utilisé pour caractériser les assassinats organisés de femmes dans les maquiladoras de Ciudad Juarez au Mexique (voir Michel Wieviorka et Jean-Paul Brodeur, L’Empire américain ?, Paris, Jacob Duvernet, 2004). Il est aujourd’hui utilisé en Afrique du Sud pour qualifier les assassinats des lesbiennes et les meurtres des femmes par leurs maris, considérés comme des « homicides de femmes » : Shanaaz Mathews et alii, “Intimate femicide–suicide in South Africa: a cross-sectional study”, Bulletin de l’OMS, N° 86, 2008/7, pp. 552-558.

[234] Naeemah Abrahams, Shanaaz Mathews, Lorna J. Martin, Carl Lombard, Rachel Jewkes, “Intimate Partner Femicide in South Africa in 1999 and 2009”, PLoS Med 10 (4), 2013.

[235] Gopolang Makou, “Femicide in South Africa: 3 numbers about the murdering of women investigated”, Africa Check, 13 juillet 2017.

[236] Avec ce taux de 9,6/100 000 femmes, l’Afrique du Sud se situe en quatrième position mondiale derrière le Salvador (12), la Jamaïque (10.9), le Guatemala (9,7). “Femicide:
A Global Problem”, Small Arms Survey Research Notes 14, février 2012, p. 3.

[237] Shanaaz Mathews et alii, Every Six Hours a Woman is Killed by her Intimate Partner – A National Study of Female Homicide in South Africa, Medical Research Council, 2004.

[238] Naeemah Abrahams and alii, « Intimate Partner Femicide in South Africa in 1999 and 2009 », op. cit.

[239] Lori Heise et Claudia Garcia-Moreno, “Violence by intimate partners”, in Etienne Krug, Linda Dahlberg, James Mercy, Anthony Zwi et Rafael Lozano (dir.), World Report on Violence and Health, Genève, World Health Organization, 2002, pp. 87-122.

[240] Shanaaz Mathews et alii, Every Six Hours a Woman is Killed by her Intimate Partner…, op. cit.

[241] D’autres initiatives de ce type se multiplient sur les réseaux sociaux. Par exemple, en avril 2016, le hashtag #Weareoneofthree rappelle qu’une femme sur trois est susceptible de subir une agression sexuelle. #RURefenrencelist fait référence à une liste diffusée par les étudiants de Rhodes qui dénoncent les violeurs vivant sur le campus. #Chapter2.1.2, quant à lui, met en exergue le chapitre de la Constitution qui condamne les abus à l’encontre des femmes. Clotilde Alfsen et Clélia Bénard, « Être une femme noire, le double combat des étudiantes sud-africaines », Cheek Magazine, 26 juillet 2016.

[242] Andie Reeves, “#Menaretrash: The Inevitable Backlash To Sa’s Femicide Problem”, Marie-Claire, 12 mai 2017.

[243] Nicole-Claude Mathieu, L’arraisonnement des femmes…, op. cit.

[244] Selon Andrée Michel, le patriarcat est un système qui utilise – ouvertement ou de façon plus subtile – tous les mécanismes institutionnels et idéologiques à sa portée (le droit, la politique, l’économie, la morale, la science, la médecine, la mode, la culture, l’éducation, les médias, etc.) afin de reproduire les rapports de domination entre les hommes et les femmes, de même que le capitalisme les utilise pour se perpétuer. Selon Christine Delphy, « le patriarcat est littéralement l’autorité du père ». Andrée Michel, Que sais-je. Le Féminisme, Paris, PUF, 1980, 2e édition mise à jour : 4e trimestre 1980, 128 p. ; Christine Delphy, « Théories du patriarcat », in Helena Hirata & alii (dir.), Dictionnaire critique du féminisme, Paris, PUF, 2000, (2e édition augmentée 2004), 315 p., pp. 141-146.

[245] Clotilde Alfsen et Clélia Bénard, op. cit.

[246] Lyn Snodgrass, “Illegal guns fuel violent crime, wreak deadly havoc in South Africa”, The Conversation, 14 octobre 2015, https://theconversation.com/illegal-guns-fuel-violent-crime-wreak-deadly-havoc-in-south-africa-49006, consulté le 28 février 2018.

[247] Ibid.

[248] Natascha Mueller-Hirth, After the rainbow nation: Jacob Zuma, charismatic leadership and national identities in Post-Polokwane South Africa, Department of Sociology Goldsmiths, Université de Londres, 2010, 16 p. ; Joelle Palmieri, « Le masculinisme d’État en renfort du patriarcat », op. cit.

[249] Lisa A. Lindsay, “Working with Gender: The Emergence of the ‘Male Breadwinner’ in Colonial Southwestern Nigeria”, in Catherine Cole, Takyiwaa Manuh & Stephan Miescher F. (dir.), Africa After Gender?, Indiana University Press, 2007, 344 p., p. 241-252.

[250] Ibidem.

[251] Marc Semo, « Référendum en Turquie : quels sont les enjeux de la réforme constitutionnelle ? », Le Monde, 16 avril 2017, http://www.lemonde.fr/europe/article/2017/04/10/les-enjeux-de-la-reforme-constitutionnelle-en-turquie_5109073_3214.html, consulté le 13 mars 2018.

[252] « Femmes exécutées : Günay, Dilek, Dilan, Şirin, Yeliz, Taybet… Sıla », Kedistan, 6 mai 2017, http://www.kedistan.net/2017/05/06/femmes-executees-gunay-dilek-dilan-sirin-yeliz-taybet-sila/, consulté le 13 mars 2018.

[253] “Murder a fact of life for women in Turkey”, Hürriyet Daily News, http://www.hurriyetdailynews.com/default.aspx?pageid=438&n=women-murder-victims-increase-snowballing-in-turkey-2011-02-20, consulté le 28 novembre 2015 ; Vladimír Bízik, A History of Violence and Humanity: The Case of Turkey, Masaryk University Faculty Of Social Studies, Department of International Relations and European Studies International Relations, 2015.

[254] “Turkey’s Women Organizations Demand Action Against ‘Femicide’“, epress.am, 15 novembre 2010, http://epress.am/en/2010/11/15/turkeys-women-organizations-demand-action-against-femicide.html, consulté le 13 mars 2018.

[255] Ibid.

[256] Ibid.

[257] Ibid.

[258] Ibid.

[259] Ihsan Cetin, “Defining Recent Femicide in Modern Turkey: Revolt Killing”, Journal of International Women’s Studies Volume 16 (2), janvier 2015, pp. 345-360, http://vc.bridgew.edu/cgi/viewcontent.cgi?article=1801&context=jiws, consulté le 14 mars 2018.

[260] Arin Canan, 2001, « Femicide in the Name of Honor in Turkey », Violence Against Women Volume 7 Issue 7, Juillet 2001, pp. 821-825.

[261] Ibid.

[262] Ibid.

[263] ibid.

[264] Durbas Bingul, “Silencing women’s rights activists in Turkey”, OpenDemocracy, 10 décembre 2012, http://www.opendemocracy.net/5050/bingul-durbas/silencing-womens-rights-activists-in-turkey?utm_source=feedburner&utm_medium=feed&utm_campaign=Feed%3A+opendemocracy+%28openDemocracy%29&utm_content=Google+Reader, consulté le 9 mai 2014.

[265] Ibid.

[266] « Le Progrès des femmes dans le monde – En quête de Justice », OnuFemmes, 2011, http://www.unwomen.org/-/media/headquarters/attachments/sections/library/publications/2011/progressoftheworldswomen-2011-fr.pdf?la=en&vs=2837, consulté le 13 mars 2018.

[267] “Signatures and ratifications”, Council of Europe, 1er juillet 2013. https://www.coe.int/en/web/conventions/full-list/-/conventions/treaty/country/TUR?p_auth=HZHvdTZf, consulté le 13 mars 2018.

[268] Shena Cavallo, “Access to Abortion in Turkey: No Laughing Matter”, International Women’s Health Coalition, 17 février 2015, https://iwhc.org/2015/02/access-abortion-turkey-no-laughing-matter/, consulté le 14 mars 2018.

[269] Ibid.

[270] Arash Ahmadi, “Turkey PM Erdoğan sparks row over abortion“, BBC Monitoring, 1er juin 2012, http://www.bbc.com/news/world-europe-18297760, consulté le 14 mars 2018.

[271] “Turkish PM under fire for urging to have more children“, Hürriyet, 13 mars 2008, http://www.hurriyet.com.tr/gundem/turkish-pm-under-fire-for-urging-to-have-more-children-8448562, consulté le 14 mars 2018.

[272] Hannah Arendt, Eichmann à Jérusalem. Rapport sur la banalité du mal, Paris, Gallimard, 2002.

19 réflexions au sujet de « Afrique du Sud, France, Turquie ou comment se banalise la militarisation de la société »

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